Entretien avec le Pr Marc Nicolino*
LA TECHNOLOGIE a beaucoup progressé depuis les premières pompes, dont l’incrémentation était beaucoup trop élevée pour les petits enfants ; elles sont maintenant bien mieux adaptées avec un large éventail de choix pour les débits de base et les dosages. De fait, on peut facilement administrer l’insuline avec des doses très précises à plus ou moins 0,025 U. Le cathéter souple laissé en place pendant 3 jours est aussi maintenant d’une taille plus appropriée à l’enfant.
Indispensable chez le nourrisson.
« Il y a un consensus pour prescrire systématiquement la pompe à insuline en cas de diabète chez un nourrisson. D’une part, le nombre d’injections serait trop élevé (une à chaque biberon !) mais, surtout, il est essentiel d’éviter les hypoglycémies sévères, qui seraient dramatiques chez un nouveau-né dont le cerveau n’est pas complètement différencié, avec un risque de convulsions et de séquelles neurologiques définitives », insiste le Pr Marc Nicolino (Lyon). Les multi-injections comportent un risque de surdosage, puisque le stylo ne peut pas administrer moins de 0,5 UI et que l’action de l’insuline est variable d’un jour à l’autre et au cours du nycthémère. Au contraire, la pompe, délivrant uniquement de l’insuline rapide avec des débits de base très faibles n’entraîne pas de surdosages.
La pompe peut aussi être indiquée chez l’enfant plus grand dans le même souci d’éviter les hypoglycémies.
Les autres indications sont plus classiques et similaires à celles de l’adulte : diabète non équilibré par les multi-injections, patients ne supportant plus les 4 à 5 injections par jour, dans le but d’améliorer la qualité de vie. Le port d’une pompe permet toutes les activités scolaires et sociales y compris sportives.
Justifier le rapport bénéfice/coût.
La pompe est plus physiologique que les injections ; on peut la comparer à un petit pancréas artificiel avec un débit de base goutte à goutte et l’apport d’un bolus au repas, ce qui est intellectuellement plus simple à comprendre que les schémas d’injection. C’est cependant une technologie pointue relativement complexe et il faut s’assurer dans des milieux très défavorisés que l’éducation thérapeutique a bien permis d’expliquer son maniement.
Vu le surcoût de la pompe à insuline, elle ne doit être proposée que si elle est bien utilisée. Des problèmes peuvent survenir à l’adolescence, où le jeune entre souvent en conflit avec son diabète, a tendance à mal gérer sa pompe et ne l’actionne pas forcément pour faire le bolus. Il peut aussi la rejeter parce que son image de soi n’est pas compatible avec le port d’une pompe 24/24 heures qui se remarque à la piscine, dans les vestiaires, etc.
Par ailleurs le port d’une pompe impose de communiquer constamment avec elle, ce qui n’est pas toujours le cas. Or le cathéter risque de se boucher, et si l’alarme n’a pas fonctionné, le seul moyen de le savoir est de vérifier les glycémies capillaires. On ne doit pas délivrer de pompe à un adolescent qui ne la supporte pas ou n’accepte pas de faire les glycémies capillaires.
Ces limites expliquent que même si la proportion d’enfants sous pompe est plus élevée que chez l’adulte (30 à 35 %) elle n’atteindra probablement jamais 100 % ; il n’y a pas non plus de raison de passer sous pompe un enfant bien équilibré et satisfait du stylo. Il est d’ailleurs préférable d’apprendre aussi la technique des multi-injections pour pouvoir faire face en cas de problème avec la pompe.
« Pour justifier le coût supplémentaire lié à la pompe, nous devrons prouver qu’elle apporte un bénéfice en termes d’équilibre métabolique et continuer les études pour vérifier son impact sur les complications du diabète. Des enfants n’ont connu que la pompe dont certains ont 20 ans maintenant, son acceptabilité à long terme est donc bien établie. La plupart des études chez l’enfant soulignent que l’HbA1c est améliorée par rapport à la multi-injections, grâce à un schéma d’administration plus physiologique qui gomme les importantes variations glycémiques observées chez les enfants. Par extrapolation, il est logique de penser que les complications seront réduites si le diabète est équilibré », conclut le Pr Nicolino.
* Endocrinologie pédiatrique, diabète et maladies héréditaires du métabolisme, Lyon
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