DE NOTRE CORRESPONDANTE
COMME LE RAPPELLE au « Quotidien » le Dr Marie-Paule Roth (INSERM, Toulouse, France), qui a dirigé l'équipe française, « le fer est indispensable pour la synthèse de l'hémoglobine des globules rouges, et pour de nombreux processus cellulaires tels que le transport de l’oxygène et la respiration. Il s'agit donc d'un élément vital pour l’organisme ».
« Le fer est absorbé dans l’organisme par les cellules intestinales. Cependant l’organisme ne sait pas l’excréter. L’absorption doit donc être très finement régulée en fonction des besoins pour éviter que ne s’installe une surcharge en fer potentiellement toxique ».
« Les troubles du métabolisme du fer affectent plus d'un milliard de personnes dans le monde », précise au « Quotidien » le Dr Jodie Babitt (Harvard Medical School, Boston), qui a supervisé l'autre équipe. « Le déficit en fer conduit à l'anémie, tandis que la surcharge en fer cause l'hémochromatose, avec atteinte du foie, du coeur, des glandes endocrines et des articulations ».
Hepcidine : un frein sur l'absorption intestinale du fer.
« En 2001, des chercheurs de Rennes et de Paris ont découvert le rôle de l’hepcidine, une molécule produite par le foie lorsque la quantité de fer dans l’organisme devient trop importante », explique le Dr Roth.
« L’hepcidine est véhiculée par la circulation sanguine et va, dans l’intestin, bloquer la ferroportine qui est la porte d’entrée du fer dans l’organisme. On ignorait cependant le mécanisme permettant d’activer la synthèse d’hepcidine ».
« Notre équipe a trouvé la molécule qui permet cette activation. Il s’agit de la molécule BMP6 que l’on pensait à tort impliquée dans le développement du squelette (BMP pour Bone Morphogenetic Protein). Nous avons tout d’abord montré que la synthèse de BMP6 augmente lorsque les stocks en fer de l’organisme sont trop élevés, et au contraire diminue en cas de carence en fer. Nous avons ensuite montré que l’absence de BMP6 chez la souris inhibe totalement la production d’hepcidine. La porte d’entrée du fer ne peut plus être bloquée et ces souris développent très rapidement une surcharge en fer massive. La molécule BMP6 est donc indispensable pour adapter l’absorption du fer aux besoins de l’organisme ».
De même l'équipe américaine de Jodie Babitt a montré que la souris knock-out en gène BMP6 présente un phénotype ressemblant à l'hémochromatose héréditaire humaine, avec déficit en hepcidine et surcharge tissulaire en fer. Ils montrent aussi que l'administration de BMP6 chez la souris augmente l'expression de l'hepcidine et réduit les concentrations sériques de fer, tandis que l'inhibition de BMP6 réduit l'expression d'hepcidine, mobilise les réserves en fer, et augmente les concentrations sériques en fer.
Plusieurs implications cliniques sont décrites par les 2 équipes.
Il est possible que des mutations du gène BMP6 puissent représenter une cause jusqu'ici inconnue d'hémochromatose chez les patients. De plus, des variants du gène BMP6 pourraient modifier la sévérité de l'hémochromatose.
Cette découverte ouvre de nouvelles approches thérapeutiques potentielles.
« Des agonistes de BMP6 pourraient permettre de traiter les malades atteints d’hémochromatose », laisse entrevoir le Dr Roth. « A l'heure actuelle, seules les saignées permettent de traiter les patients, ce qui est assez contraignant ».
« Au contraire, des antagonistes de BMP6 pourraient être utiles pour le traitement de certaines anémies », ajoute-t-elle.
Marie-Paule Roth et son équipe envisagent maintenant de « séquencer le gène BMP6 chez les patients atteints d'hémochromatose, pour trouver les variants pouvant expliquer les formes sévères de la maladie » et « d'étudier la régulation de l'expression du gène BMP6 par le fer ».
En plus de ces objectifs, l'équipe de Jodie Babitt envisage de développer et de tester des modulateurs de la voie BMP6, en tant que nouvelles thérapies potentielles pour les troubles du métabolisme du fer".
« Nature Genetics », 1er mars 2009, Meynard et coll., Andriopoulos et coll., DOI : 10.1038/ng.320, DOI : 10.1038/ng.335.
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