La ménopause, une bonne distance entre belle-mère et belle-fille

Publié le 22/08/2012
ménopause

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Crédit photo : PHANIE

Pourquoi, à la différence de ce que l’on observe chez la plupart des mammifères, la vie reproductive des femmes s’arrête-t-elle aux alentours de la cinquantaine ? Probablement pour éviter une compétition délétère entre belle-mère et belle-fille. Ainsi que pour permettre aux femmes mûres de s’occuper de leurs petits-enfants : aller leur chercher de la nourriture et les protéger contre les accidents et les maladies.

Parmi les grands mystères de la nature, il y a la ménopause : pourquoi les femmes, à la différence de la plupart des autres animaux, perdent-elles leur capacité à se reproduire aussi tôt dans la vie ? On a peu eu l’occasion de chercher à résoudre cette énigme car il faut pour cela recueillir des données sur les succès, en termes de reproduction, sur plusieurs générations de femmes, tout en sachant qui a vécu avec qui et quand. C’est dire tout l’intérêt du nouveau travail publié dans « Ecology Letter » par des chercheurs de quatre universités : une en Finlande (Turku), deux au Royaume-Uni (Exeter et Sheffield) et une aux États-Unis (Stanford). Les chercheurs ont analysé les données collectées par Virpi Lummaa (Sheffield) et Mirkka Lahdenperä (Turku) à partir de registres des églises de l’ère pré-industrielle de Finlande. Ils ont étudié les informations concernant les taux de naissance et de décès de 1700 à 1900 ; soit bien avant la contraception moderne et l’avènement des systèmes de soins.

Petits-enfants : risque de décès avant 15 ans

Les analyses révèlent que les femmes avaient plus de petits-enfants si elles arrêtaient de se reproduire aux alentours de 50 ans. Les chercheurs estiment que cela est dû en partie à une diminution de la compétition entre la femme vieillissante et sa belle-fille et en partie parce qu’elle peut ainsi apporter une aide à ses petits enfants. En effet, l’analyse de registres montre qu’un enfant né dans une famille où la belle-mère et la belle-fille se reproduisaient en même temps avait deux fois plus de risque de mourir avant l’âge de 15 ans ; ce qui n’était pas le cas dans les familles où une mère et sa fille avaient des bébés en même temps. Ce qui suggère que des parentes se reproduisent de façon coopérative et que des femmes non apparentées se reproduisent de façon conflictuelle.

Pour les auteurs, il existe clairement un bénéfice biologique pour une femme à coopérer avec sa fille : elles ont 50 % de leurs gènes en commun, donc être en compétition pour la nourriture ou autres ressources n’aurait aucun sens. Ce qui n’est pas le cas entre une belle-mère et une belle fille qui ont tout intérêt à maximiser leurs chances de diffuser leurs gènes.

Les hommes…

Finalement, les données finlandaises montrent qu’une femme tirerait un bénéfice à arrêter de se reproduire vers 51 ans si elle risque d’avoir un bébé en même temps que sa bru, mais pas avec sa fille.

« Nous sommes tellement habitués au fait que les femmes ont une ménopause que nous oublions que c’est un phénomène bizarre. Selon les théories évolutionnistes, on s’attend à ce que les animaux puissent se reproduire pendant toute leur vie, ce qui est exactement ce qui se passe chez presque toutes les espèces connues, y compris, chez les humains, les hommes, souligne Andy Russell, un des auteurs. Alors, pourquoi est-ce si différent chez les femmes ? Notre étude montre pour la première fois que la réponse pourrait résider dans la relation entre belle-mère et belle-fille. »

Ecology Letter du 23 août 2012.

 Dr EMMANUEL DE VIEL

Source : lequotidiendumedecin.fr