Tous « Covidés »

Publié le 30/06/2020
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Israël Nisand

Crédit photo : DR

Un véritable stress test s’est abattu sur le monde gynécologique et obstétrical de notre pays. La pandémie virale inédite que nous venons de vivre (et qui se poursuit) a révélé, s’il en était nécessaire, les failles et défauts de nos structures et de nos prises en charge. Malgré un flux continu de conseils émis par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) pour l’ensemble de la profession afin de protéger au mieux les femmes et les soignants, la diversité des situations et des moyens disponibles a prévalu et les patientes interrogées en aval nous disent, en gros, qu’elles n’ont pas eu de chance d’avoir besoin de nos services à ce moment-là, et ce, malgré tous les efforts que nous avons déployés.

Certes, nous avions tous peur de la survenue d’un véritable suraccident, si une contamination massive des professionnels avait déshabité nos salles de naissance. Cela ne s’est pas produit malgré des moments de grande tension dans le Grand Est et en Île-de-France. Certes, les situations d’un bout à l’autre du pays n’étaient pas comparables et rendaient parfois inappropriées des recommandations nationales qui ne pouvaient pas tenir compte des hétérogénéités régionales.

Le bilan de cette période, en première analyse, ne semble pas optimal. Les syndromes de stress post-traumatiques ont massivement augmenté et les femmes ont souvent eu l’impression d’être soignées par des équipes « à la cape » en termes de navigation, donnant parfois l’impression d’un service minimum, voire paniquées et transmettant leurs angoisses avec peu de filtres aux couples déjà stressés par le contexte.

Nous avons bien soigné les corps. Nous avons continué de sauver des vies. Techniquement parlant. Mais, parfois, ou peut-être même souvent, du fait du manque criant de moyens aggravé par l’angoisse des personnels, nous avons été contraints de négliger le soutien psychique indispensable à cette période, comme s’il était une simple variable d’ajustement : par gros temps, nous avons paré au plus pressé. Cela souligne, une fois de plus, l’état précaire de toutes les maternités de France en termes d’effectifs. Cet événement nous rappelle également les efforts qu’il nous reste à accomplir collectivement en termes de bientraitance et de soutien psychologique.

La prise en charge psychique périnatale est pour l’instant globalement déficiente. Les années à venir nous font obligation, malgré tous les efforts déjà accomplis, de rattraper ce retard. Un coup de vent ne devrait pas pouvoir enlever le toit de nos maternités.

Président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF)

Pr Israël Nisand

Source : lequotidiendumedecin.fr