L’intérêt d’une thérapie par plasma de convalescents pour certaines catégories de patients immunodéprimés atteints de Covid-19 se confirme. Après une première étude observationnelle sur 17 patients, publiée dans « Blood » en novembre 2020, une équipe de Gustave Roussy et du service de maladies infectieuses de l'hôpital Saint-Antoine (AP-HP) dirigée par la Pr Karine Lacombe livre dans « Leukemia » de nouvelles données encourageantes.
Leurs travaux ont porté sur des patients atteints d'hémopathie maligne, dont certains présentent un déficit immunitaire en lymphocytes B, « souvent traités par des anticorps monoclonaux, comme le rituximab», précise au « Quotidien » le Dr Thomas Hueso, hématologue à Gustave Roussy et premier auteur de l'étude.
Après une infection par le Covid, ces malades sont « dans l’incapacité de produire des anticorps spécifiques, du fait de leur maladie ou des traitements administrés, ou parfois des deux, limitant ainsi la clairance virale », rappelle-t-il. Chez ces mêmes patients qui ne parviennent pas à faire de séroconversion au contact du virus, la réponse vaccinale est « hétérogène et parfois suboptimale, voire nulle », poursuit-il.
Un bénéfice uniquement en cas de déficit en lymphocytes B
Au total, 112 patients atteints d'hémopathie maligne et de Covid-19, dont 81 étaient atteints d'une hémopathie lymphoïde B et traités par anti-CD20, ont reçu une thérapie par plasma de convalescents entre mai 2020 et avril 2021. Leur survie a été comparée à celle d'un groupe de 120 patients atteints d’hémopathie B mais non traités par plasma.
Il en ressort une « diminution de la mortalité de 63 % dans les hémopathies B, comparé au groupe non traité, indique le Dr Hueso. Le bénéfice semblait beaucoup moins évident chez les patients qui n’ont pas de déficit immunitaire en lymphocytes B, comme ceux atteints de leucémie ou de myélome ».
Aussi, si un traitement antérieur par anticorps monoclonaux anti-CD20 était associé à une meilleure réponse au plasma de convalescents, « l'âge, l'hypertension artérielle et la gravité du Covid-19 étaient associés à un mauvais résultat », relèvent les auteurs, qui rapportent également un meilleur contrôle de la réplication virale et une récupération clinique plus rapide chez les patients transfusés.
Ces résultats sont porteurs d’espoir pour les patients qui ne répondent ni à la vaccination, ni aux anticorps monoclonaux actuellement disponibles, le Xevudy (sotrovimab) ou l'Evusheld. « Avec la vague Omicron et la mise en échec d’anticorps monoclonaux comme le Ronapreve, par un phénomène d’échappement, le plasma de convalescents revient au goût du jour. Avec cette approche polyclonale, le virus est attaqué de toutes parts, et pas seulement par une région spécifique », ajoute l’hématologue, soulignant également le moindre coût de cette thérapie.
Une approche polyclonale probablement efficace pour d'autres patients
Selon lui, cette approche pourrait avoir des bénéfices chez « les patients qui présentent un déficit immunitaire en lymphocytes B soit du fait de leur maladie, soit engendré par des anti-CD20 : patients greffés ou souffrant de maladies inflammatoires en particulier ». L’enjeu est désormais de bien définir la population éligible, soit des « patients qui n'ont que peu ou pas de réponse vaccinale et qui ne répondent pas ou peu aux anticorps monoclonaux », précise le Dr Hueso.
Pour l’heure, la décision « difficile » d’engager un patient dans cette approche est prise en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) « quand les traitements sous AMM ont échoué », poursuit-il.
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