Dans un rapport sur le lien entre Covid-19 et système nerveux, l’Académie de médecine fait un point sur le Covid long. Si « son expression clinique, polymorphe et parfois déroutante interroge sur son mécanisme », les modes d’expression clinique dans les formes prolongées suggèrent néanmoins « une large participation du système nerveux au-delà d’une plainte cognitive quasi-omniprésente », rappellent les auteurs.
Même si « plusieurs années après le début de la pandémie, l’atteinte du système nerveux reste l’objet de nombreuses controverses », il n’en reste pas moins que le Covid long est une « réalité » touchant « un nombre considérable de patients » au regard de l’importance de la pandémie. Après « parfois un déni de la part des soignants » et « une réponse du monde médical (qui) a pu être au début incomplète voire absente », l’entité est désormais reconnue par les autorités de santé et l’Organisation mondiale de la santé. Mais le parcours est « encore chaotique », alerte le Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars) dans un avis publié en novembre.
L’Académie émet quatre recommandations dans son rapport en invitant à : – un effort de recherche coordonné pour identifier les différents mécanismes impliqués ; - un dépistage du déficit cognitif devant une plainte cognitive ; - la recherche systématique d’un trouble dépressif et/ou anxieux ; -une prise en charge spécialisée multidisciplinaire au sein de laquelle le médecin traitant doit jouer un rôle clé.
Sur le plan de la physiopathologie, le rapport expose les zones d’ombre. Plusieurs hypothèses sont avancées : persistance virale, persistance d’un syndrome inflammatoire actif, activité procoagulante, dysfonctionnement mitochondrial ou encore réactivations virales (EBV, HSV, VZV, HHV6). Pour le moment, il n’existe pas de biomarqueurs pour le suivi des patients.
« Contrairement aux patients hospitalisés qui peuvent avoir des séquelles respiratoires ou neurologiques d’un Covid-19 sévère, particulièrement après un passage en soins intensifs, le Covid long reste médicalement inexpliqué chez les patients atteints d’une infection initiale bénigne », est-il explicité.
Un syndrome post-infectieux insolite qui appelle à rester attentifs
Pour l’Académie, l’absence de congruence entre la gravité initiale de l’infection, « la pléiade de symptômes de tous appareils, les fluctuations majeures, l’invalidité disproportionnée au regard de l’amplitude limitée des déficits objectifs, des examens complémentaires normaux (…) et l’absence de profil neuropsychologique déficitaire caractéristique n’orientent pas vers l’existence de lésions spécifiques du système nerveux ».
Mais, dans le même temps, les auteurs invitent à « rester attentifs » pour plusieurs raisons. En premier lieu, car le Covid long, qualifié de « syndrome post-infectieux insolite », présente un profil clinique très différent par rapport aux autres syndromes post-infectieux. Il existe ensuite des manifestations cardiovasculaires impliquant le système nerveux autonome, au premier rang desquelles se tient le Pots (pour postural tachycardy syndrome). De plus, l’incidence des crises comitiales à six mois est supérieure à celle observée après la grippe. Mais aussi, la constatation répétée d’anomalies microstructurales à l’IRM contraste avec l’IRM anatomique classique normale et la présence d’un hypométabolisme (18F FDG) dans certaines zones cérébrales est un argument en faveur d’une atteinte du système nerveux.
L’Académie souligne ainsi « le retard en matière de recherche, dont le caractère reste encore fragmentaire » et appelle à poursuivre les efforts de façon interdisciplinaire. La systématisation du dépistage gradué et traçable d’un déficit cognitif, en particulier pour les troubles attentionnels, devrait permettre une meilleure analyse et connaissance du Covid long, plaident les auteurs. L’accent est mis sur la prise en charge précoce des troubles anxieux et dépressifs, et une structuration des soins avec le médecin généraliste au premier niveau, des cellules de coordination post-Covid territorialisées puis des centres de référence pour les cas les plus complexes.
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