Qu’en est-il de la survenue de résistance au nirsévimab avec sa large diffusion chez les nourrissons en prophylaxie de la bronchiolite à virus respiratoire syncytial (VRS) ? La plus grande étude de surveillance prospective de la sensibilité au nirsévimab, l’étude Polyres, se veut rassurante : il existe des mutations virales de résistance mais elles restent rares.
Ces travaux, coordonnés par les Prs Slim Fourati (AP-HP) et Marie-Anne Rameix-Welti (CNR des infections respiratoires à l’Institut Pasteur), ont mobilisé les scientifiques de l’AP-HP, de l’Inserm, de l’Institut Pasteur et des universités Paris-Est-Créteil et Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, membres des équipes du réseau de virologie de l’ANRS MIE. Les résultats de l’étude ont été publiés ce 14 octobre dans The Lancet Infectious Diseases.
Un virus variable par nature
Le nirsévimab (Beyfortus, Sanofi/AstraZeneca) est disponible en France depuis septembre 2023. Cet anticorps monoclonal cible un épitope sur une protéine située à la surface du VRS impliquée dans la multiplication virale, la protéine de fusion F. « Il existe un risque théorique d’émergence de variants du VRS portant sur des mutations de résistance à la neutralisation par le nirsévimab, même en l’absence de pression de sélection par l’anticorps, rapporte un communiqué de l’ANRS MIE. Le VRS est en effet un virus variable ». Des mutations d’échappement avaient été décrites chez deux des 48 VRS ayant infecté des enfants traités et ayant pu être étudiés dans les essais cliniques de phase 2b/3.
L’étude Polyres a ainsi étudié le phénomène sur un plus vaste échantillon à l’aide d’une étude observationnelle, multicentrique, se déroulant en vie réelle lors de la saison hivernale 2023-2024. Ont été inclus 695 nourrissons ayant une infection par le VRS, parmi lesquels 349 avaient reçu le nirsévimab. Le VRS-A était majoritaire cette saison et a été retrouvé chez 86,6 % des enfants infectés.
Deux mutations pour le virus VRS-B
L’analyse de 472 VRS-A (dont la moitié provenant d’enfants traités) n’a révélé aucune mutation de résistance au nirsévimab dans le site de liaison de la protéine F. Parmi les 73 enfants infectés par le VRS-B, 24 avaient reçu du nirsévimab en prophylaxie. Chez ces 24 enfants, deux isolats de VRS-B présentaient des mutations de résistance à l’anticorps, une déjà connue, l’autre inconnue et décrite ici pour la première fois.
Pour le Pr Slim Fourati, responsable de l’unité de virologie au CHU Henri-Mondor (Créteil) : « la faible prévalence des mutations de résistance au nirsévimab chez des patients traités est rassurante. Toutefois, quelques VRS-B issus de patients traités analysés à ce jour présentaient des mutations d’échappement, ce qui invite à la prudence et souligne l’importance d’une surveillance moléculaire active dans le contexte d’une future utilisation du nirsévimab à l’échelle mondiale ». Si ces résultats sont en faveur de la poursuite de la prophylaxie, analyser la dynamique d’évolution des virus reste essentiel pour anticiper toute forme de résistance.
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