Devant des parlementaires et des institutionnels, les dirigeants de la fondation FondaMental ont appelé à la pérennisation et à l’amplification du modèle original de prise en charge, complémentaire de l’offre sectorielle, que sont les centres experts en psychiatrie, le 28 février dernier.
Ouverts progressivement depuis 2010 sur le territoire métropolitain, les 53 centres spécialisés par pathologie répondent à « un besoin d’innover dans l’organisation des soins », a défendu la Pr Marion Leboyer, directrice générale de FondaMental, fondation de coopération scientifique qui coordonne ces centres. Ils constituent une offre de recours « graduée et intégrée » dans le parcours de soins et ont apporté « la preuve de leur efficacité », a-t-elle poursuivi lors d’une visite à l’hôpital Albert-Chenevier (AP-HP, Upec) de Créteil, qui accueille certaines des structures de ce réseau.
Quatre pathologies sont couvertes : troubles bipolaires, dépressions résistantes, schizophrénies et troubles du spectre de l’autisme sans retard intellectuel. Les patients sont adressés par les psychiatres libéraux (25 %) ou hospitaliers (25 %), mais aussi par les médecins généralistes (25 %), a détaillé le Pr Pierre-Michel Llorca, coordinateur des réseaux des centres experts. Les patients bénéficient d’un bilan médical complet, d’un dépistage des comorbidités et de recommandations thérapeutiques personnalisées « basées sur les dernières données de la science », complète le psychiatre.
Le défi de la psychiatrie de précision
L’ambition est de « relever le défi de la psychiatrie de précision » pour « offrir le bon traitement, au bon moment à chaque patient », explique la Pr Leboyer. L’objectif porte aussi sur la constitution de bases de données utiles à la recherche, ajoute le Pr Llorca. Les données de plus de 8 000 patients sont déjà à disposition des chercheurs, leur offrant des cohortes « uniques » par leur taille.
Selon les études menées pour évaluer le modèle, un an après un premier bilan dans un centre expert, les patients connaissent une amélioration clinique de leurs symptômes, les réhospitalisations sont moins nombreuses et les traitements mieux suivis. Le succès du modèle est aussi économique, souligne la Dr Ophélia Godin, épidémiologiste à l’Inserm, grâce à la diminution de moitié du risque de réhospitalisations, alors que ces dernières représentent 80 % des coûts directs médicaux associés à la schizophrénie et aux troubles bipolaires.
Ce modèle « inspirant » offre un recours à une équipe spécialisée dans un paysage marqué par le développement d’un « arsenal thérapeutique qui devient complexe à manier », relève le Pr Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale. Mais, victimes de leurs succès, les centres experts ont des délais d’attente pour un premier rendez-vous qui peuvent atteindre jusqu’à trois ans sur certains sites et pour certaines pathologies.
Objectif : 20 centres supplémentaires
Pour répondre aux besoins, FondaMental estime nécessaire de déployer sur le territoire 20 centres supplémentaires avec l’objectif que chacune des 18 régions dispose d’une structure par pathologie. « La généralisation des centres experts sur les territoires s'impose comme une nécessité », insiste la Pr Leboyer.
La pérennisation du modèle bénéficierait également de modifications réglementaires et/ou législatives permettant l’inscription des centres dans l’organisation des soins, une manière de ne plus être « dépendants des mesures budgétaires », explique le Pr Llorca. Pour chaque centre adossé à un hôpital, le budget annuel est estimé à 320 000 euros. Mais, 22 des 53 centres existants (et notamment les 14 dédiés sur la dépression résistante) ne sont pas financés. Le budget global nécessaire pour un maillage complet du territoire est évalué à 18 millions annuels, dont un million d’euros pour les fonctions de coordination. Le Pr Llorca envisage aussi une extension du modèle à d’autres pathologies : conduites suicidaires, trouble obsessionnel compulsif, hyperactivité avec déficit de l’attention…
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