TOUT UN NOUVEAU champ de psychothérapies s’est ouvert au début du siècle dernier, avec l’apparition du courant comportementaliste. Les théories de Pavlov et de Skinner, qui ont mis au jour la problématique du conditionnement, sont toujours utilisées. Ce domaine de la psychologie expérimentale s’est ensuite développé pour intégrer les mécanismes de pensée, avec les thérapies cognitives. Albert Ellis et Aaron Beck, à l’origine formés à la psychanalyse, ont mis en exergue les interconnexions existant entre les comportements, les mécanismes de pensée et les émotions.
Plus récemment, les thérapies cognitives se sont inspirées de pratiques méditatives. Cette troisième vague de TCC fait ainsi largement appel à la pleine conscience ou « mindfullness ». Dans cette approche, l’individu est centré sur ce qu’il vit au quotidien, sur ses pensées et ses émotions, sans chercher à les juger, à les interpréter, ou à tout mettre en œuvre pour s’en dégager. La pleine conscience est une pratique de l’attention et de l’éveil, qui vise à favoriser l’acceptation de l’expérience du moment en se détachant du mode réactif. Ce dernier est en effet souvent à l’origine d’autodépréciations, d’anticipations anxieuses…
La thérapie cognitive s’appuyant sur la pleine conscience ou MBCT (mindfullness based cognitive therapy) se montre particulièrement intéressante dans la prise en charge préventive des rechutes dépressives. Les personnes ayant vécu un épisode dépressif ont souvent des souvenirs, des sensations et des émotions s’y rattachant, qui peuvent être réactivés lors d’une « baisse de moral » passagère. L’interprétation d’une pensée ou d’une émotion comme un signe de rechute est alors susceptible d’enclencher une spirale descendante vers la dépression. L’objectif de la MBCT est d’aider les patients, après un épisode dépressif, à accepter leurs émotions telles qu’elles sont, sans rentrer dans les schémas de pensées ruminatives et négatives.
Cette approche a fait la preuve de son efficacité dans ce contexte, avec une réduction de moitié du risque de rechute dépressive chez des patients ayant connu trois épisodes dépressifs ou plus (1).
Gestion du stress et de l’anxiété.
Autre grand champ d’application de la pleine conscience : la gestion du stress et de l’anxiété. Kabat-Zinn est le premier à avoir intégré la méditation pour prendre en charge des patients souffrant de troubles somatiques chroniques. Les programmes MBSR (mindfullness, based stress reduction) ont montré leur efficacité dans la population générale pour réduite le stress et l’anxiété (2).
La thérapie comportementale dialectique ou DBT (dialectal behavior therapy), essentiellement utilisée chez des sujets borderline, inclut également divers exercices de pleine conscience et obtient aussi des résultats encourageants.
La thérapie d’acceptation et d’engagement ou ACT (acceptance and commitment therapy) est une approche axée sur la flexibilité psychologique, qui utilise elle aussi la pleine conscience. L’objectif est que l’individu soit pleinement conscient de ce qu’il vit et de ce qu’il fait, en étant en équilibre et en accord avec ses valeurs. Son champ d’action est assez large, allant de la phobie simple à la douleur chronique, en passant par le sevrage tabagique.
« Ainsi, la troisième vague des thérapies cognitives et comportementales réincorpore les aspects émotionnels qui avaient pendant longtemps été mis de côté, afin d’aider les patients à modifier le rapport qu’ils entretiennent avec leurs émotions et leurs pensées », conclut le Dr Frédéric Chapelle.
D’après un entretien avec le Dr Frédéric Chapelle, président de l’association française de thérapie comportementale et cognitive. Co-auteur avec Benoît Monié, Rollon Poinsot et coll. de l’ouvrage : " L’Aide-mémoire des Thérapies comportementales et cognitives ". Collection : Les outils du psychologue, Dunod
Novembre 2011 - 288 pages.
(1) Teasdale JD et coll. Prevention of relapse/recurrence in major depression by mindfulness-based cognitive therapy. J Consult Clin Psychol 2000 Aug ; 68 (4) : 615–23.
(2) Shapiro SL et coll. Effects of mindfulness-based stress reduction on medical and premedical students. J Behav Med. 998 Dec ;21(6) :581-99.
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