Mieux comprendre l'évolution des troubles bipolaires. Tel est l'objectif d'une étude longitudinale de la Fondation Fondamental publiée dans l'« Australian and New Zealand Journal of Psychiatry ».
L'équipe d'Ophelia Godin et al. s'est penchée sur un échantillon de 2 351 individus suivis pendant trois ans (16,4 mois en moyenne pour chaque individu) dans l'un des dix centres experts Fondamental, au sein de la cohorte FACE-BD. La cohorte comporte plus de 60 % de femmes, avec un âge médian à l'inclusion de 40,4 ans et une durée médiane de la maladie de 15 ans.
Les paramètres étudiés étaient à la fois cliniques (comorbidités psychiatriques, traitement psychotrope, adhésion au traitement, sommeil, symptômes psychiatriques…), biologiques (glycémie, hypercholestérolémie…), physiologiques (tension artérielle, poids…) et sociodémographiques (sexe, âge…). Le fonctionnement global a été évalué grâce au test d'évaluation fonctionnelle des troubles bipolaires (FAST) comprenant 24 éléments dans six sous-domaines : la cognition, l'autonomie, le fonctionnement professionnel, les problèmes financiers, le temps libre et les relations interpersonnelles.
Un pronostic favorable pour la majorité des patients
L'étude met en évidence trois types de trajectoires : une altération fonctionnelle considérée comme légère pour 72,5 % des personnes atteintes, sévère pour 19,1 % et une amélioration fonctionnelle pour 8,4 % d’entre elles. Les premières affichaient un score relativement bas au test FAST (signe d'un fonctionnement correct, ou légèrement altérée), qui restait stable au cours du suivi ; les secondes ont un score élevé au test FAST révélant une altération sévère, également stable en début et fin de suivi ; les dernières voient leur score élevé s'infléchir au fil du temps.
Les épidémiologistes ont ensuite regardé les différences entre les deux premiers groupes de patients (altération sévère et légère), laissant de côté le dernier groupe, de plus petite taille.
Sept facteurs prédictifs d’une altération sévère du fonctionnement
À partir d'analyses multivariées, il ressort que les patients présentant une altération sévère du fonctionnement ont quatre fois plus de risques d'être au chômage. Ils se distinguent aussi — par rapport aux patients ne présentant qu'une légère altération — par l'existence un peu plus fréquente d'un traumatisme infantile (OR = 1,03), un nombre un peu plus élevé d'hospitalisations (OR = 1,1), davantage de symptômes dépressifs (OR = 1,12), un surpoids (OR = 1,08) voire une obésité, davantage de troubles du sommeil (OR = 1,07) et un nombre plus important de médicaments psychotropes prescrits initialement (OR = 1,3). Des résultats cohérents avec d'autres études transversales, est-il indiqué.
Si les auteurs mettent en garde sur le fait que ces associations ne disent rien de la causalité, ils appellent à s'en inspirer pour proposer des thérapies personnalisées. Et de citer en exemple, des stratégies médicamenteuses et psychothérapeutiques contre les symptômes dépressifs, la réhabilitation psychosociale pour améliorer la qualité de la vie, un travail d'accompagnement pour perdre du poids, l'EMDR pour réduire l’impact de traumatismes infantiles ou encore des efforts pour réduire la polymédication.
O Godin et al. Australian & New Zealand Journal of Psychiatry. 2020;54(10):985-996.
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