Le Groupe de Recherche en Psychiatrie

Un espace collaboratif de recherche

Publié le 05/12/2013
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Pr Marie-Odile Krebs (1)

LES MALADIES psychiatriques touchent environ une personne sur 5 au cours de la vie. Les besoins restent immenses pour améliorer les connaissances et les soins, puisqu’un tiers des patients ne répondent pas ou peu aux traitements disponibles. Pour ces patients, les recherches laissent entrevoir des avancées grâce à une approche plus personnalisée. En effet, les neurosciences remettent en question ce que l’on croyait savoir sur les maladies psychiatriques. Les catégories diagnostiques sur lesquelles se fondent les essais thérapeutiques et les recommandations correspondent moins à des maladies qu’à un continuum complexe de syndromes, évolutifs et hétérogènes. En d’autres termes, nos gènes comme nos patients ne connaissent pas le DSM !

En 2011, 15 équipes de niveau international, reconnues par les instances de recherche (CNRS, Inserm, CEA et 10 universités) s’engagent pour créer un espace collaboratif de recherche en psychiatrie et partager une stratégie scientifique à l’échelle nationale. Ce GDR, sous l’égide d’Aviesan, regroupe aujourd’hui 20 équipes et entend s’ouvrir vers des équipes qui développent des approches méthodologiques dans le champ de la modélisation, le partage de données de santé, les neurosciences cognitives, l’imagerie, la modélisation animale, l’innovation diagnostique et thérapeutique… Le GDR 3557 souhaite également se tourner vers certains chercheurs intéressés isolés, ainsi que des équipes cliniques. C’est ainsi que l’association « Institut de Psychiatre » a vu le jour. L’institut s’inscrit dans le prolongement du GDR 3557, en permettant d’attirer des chercheurs isolés et ou en émergence, des chercheurs dans des PME en biotechnologie, de même que des équipes hospitalières motivées pour participer à ces efforts de recherche. Dans un pays où une partie de la psychiatrie est soignée dans des structures spécialisées, pas toujours en lien avec des services universitaires, il est en effet essentiel que les chercheurs se tournent aussi vers ces services pour les travaux de recherche clinique : c’est là que se trouvent les populations représentatives de patients souffrant des troubles les plus sévères, qu’ils soient dépressifs résistants, bipolaires, schizophréniques, ou obsessionels-compulsifs ou neurodéveloppementaux. Ainsi pourra-t-on atteindre la masse critique permettant de constituer des cohortes cliniques de taille suffisante à la mesure du caractère polyfactoriel de ces maladies. À condition de lever plusieurs verrous :

• Améliorer la capacité à collecter et partager des données de recherche, en prenant en compte la particularité du paysage des centres psychiatriques, mais aussi l’incroyable foisonnement de nos variables cliniques, regroupées en échelle ou entretiens, outils de base de description imposées par les standards de la recherche en psychiatrie : à défaut de biomarqueurs fiables, un entretien clinique à visée diagnostique répondant aux algorithmes diagnostiques des classifications atteint rapidement 1 500 variables... avant même que le cœur de l’étude n’ait débuté.

• Améliorer la capacité à décrire et quantifier le comportement dans des modélisations enrichies par les données récentes des neurosciences : il faut développer ou améliorer des outils de caractérisation objectifs et quantifiables, notamment par des évaluations cognitives, électrophysiologiques ou en imagerie fonctionnelle, en adaptant les paradigmes aux questions posées.

• Décloisonner le savoir clinique psychiatrique et les modélisations en neurosciences précliniques ou chez l’homme dans une approche multimodale incluant l’imagerie et la quantification des processus cognitifs, neurophysiologiques ou sensorimoteurs et l’analyse clinique des modèles animaux.

Les groupes de travail du GDR 3557 s’attellent à ces verrous, dans une démarche transversale et multimodale, centrée sur la compréhension des mécanismes physiopathologiques et avec comme finalité l’amélioration des connaissances sur la dynamique évolutive des troubles du développement (troubles autistiques, schizophrénie) dans l’espoir de pouvoir prévenir l’évolution des troubles à l’âge adulte et le développement de nouvelles modalités thérapeutiques pour soigner les formes résistantes des troubles psychiatriques majeurs (dépression, TOC, psychose, addictions) et le handicap psychique. À très forte représentation clinique, le GDR 3557 / Institut de psychiatrie a opté pour la devise : « Mieux décrire pour mieux soigner ».

(1) Chef de Service, SHU S14, Centre hospitalier Sainte-Anne, Paris.

http://www.idpsy.org/


Source : Bilan spécialistes