PAR LE Pr THIERRY PETITCLERC *
L’HÉMODIALYSE quotidienne consiste, par rapport à un programme classique, à multiplier par deux le nombre de séances (soit six par semaine) et à diviser par deux leur durée (soit 2 heures à 2 h 30). Elle peut être envisagée selon deux modalités très différentes.
- L’hémodialyse quotidienne à haut débit de dialysat (≥ 500 ml/min) est la procédure généralement pratiquée. Elle consiste à laisser inchangés, d’une part le matériel, consommable (lignes, dialyseur, concentrés de dialyse) ou non (moniteur de dialyse, traitement de l’eau) et, d’autre part, les paramètres de la séance (débits de sang et de dialysat). L’accueil des patients en hémodialyse quotidienne dans les unités d’hémodialyse existantes est ainsi grandement facilité. En revanche, cette procédure reste, comme l’hémodialyse tri-hebdomadaire, de plus en plus difficile à mettre en place au domicile du patient, en raison des normes sécuritaires nécessaires en ce qui concerne l’eau de dialyse (installation et entretien d’un appareil d’osmose, contrôle systématique avec déplacement d’un technicien dès qu’il y a eu absence du domicile, etc.).
- L’hémodialyse quotidienne à bas débit de dialysat (de l’ordre de 150 à 200 mL/min) s’appuie sur un concept analogue à celui de la dialyse péritonéale : échanges quasi quotidiens, effectués au domicile à l’aide d’une machine spécifique de taille comparable aux moniteurs de dialyse péritonéale automatisée, d’une vingtaine de litres par jour de liquide de dialyse stérile et apyrogène livré en poches d’environ 5 litres, ce qui évite la nécessité d’un traitement d’eau. Elle est à ce jour peu répandue (seuls quelques abstracts à l’occasion de congrès sont disponibles dans la littérature) et non pratiquée en France.
Peut-elle être choisie par le patient ?
Beaucoup de néphrologues pensent que, de manière logique, les patients n’auront pas tendance à opter pour six séances d’hémodialyse par semaine au lieu de trois lorsque leur sera donnée l’information sur les différentes modalités de dialyse. Il n’en reste pas moins que six séances de deux heures, surtout si elles sont pratiquées à domicile (ce qui évite les temps de transport), peuvent parfois être plus faciles à « caser » dans la vie professionnelle que trois séances de quatre heures, et plus faciles à accepter par l’entourage proche que sept nuits avec la machine de dialyse péritonéale automatisée !
Par ailleurs, l’hémodialyse quotidienne à bas débit pourrait être choisie par le patient autonome, traité jusqu’alors par dialyse péritonéale automatisée la nuit et obligé de changer de technique en raison d’un mauvais fonctionnement de son péritoine, parce qu’il retrouverait alors de nombreux points communs : procédure quotidienne à domicile, autonomie, livraison de poches de dialysat, machine utilisant une cassette et des lignes stériles et à usage unique de montage extrêmement facile et rapide, etc.
Peut-elle être proposée au patient ?
La réponse ne peut être donnée que par les autorités de tutelle qui doivent fixer clairement un tarif de remboursement de l’hémodialyse quotidienne et ainsi favoriseront ou freineront son essor.
L’hémodialyse quotidienne à haut débit présente à l’évidence un surcoût non négligeable par rapport à l’hémodialyse tri-hebdomadaire. Ce surcoût doit cependant être mis en balance, d’une part avec les économies liées aux bénéfices apportés (diminution du nombre de médicaments, spécialement antihypertenseurs et érythropoïétine, et du nombre des replis et des journées d’hospitalisation), d’autre part avec le service rendu aux patients (en particulier disparition de la fatigue post-dialytique, liberté du régime alimentaire et des apports liquidiens) : après qu’ils ont expérimenté l’hémodialyse quotidienne, souvent en raison d’une mauvaise tolérance à l’hémodialyse tri-hebdomadaire, les patients, dans leur grande majorité, ne souhaitent pas revenir à un mode tri-hebdomadaire tant ils ont l’impression de ne plus être malades !
L’hémodialyse quotidienne à bas débit devrait permettre l’essor de l’hémodialyse à domicile. Cependant son développement nécessite, non seulement la réalisation préalable d’un protocole multicentrique (actuellement en projet) afin de démontrer sa bonne tolérance au long cours, mais aussi le développement d’un matériel spécifique. Ses capacités d’épuration, son coût et la qualité de vie ressentie par le patient devront être comparés à ceux de la dialyse péritonéale. Il semblerait également logique que, à l’instar de la dialyse péritonéale, sa tarification soit du même type (forfait hebdomadaire) et que le patient non autonome puisse bénéficier de l’aide à domicile d’une infirmière libérale.
* Directeur médical à l’AURA-Paris.
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