Pourquoi communiquer de nouveau sur le don d'organes et de tissus et la greffe ?
2017 a été marquée par la mise en œuvre de l'amendement permettant de définir les modalités d'expression du refus. Cette année-là, plus de 6 100 greffes d'organes ont été réalisées, dont 611 greffes sur donneurs vivants. Dans le plan greffe III figure l'objectif de 1 000 greffes sur donneurs vivants d'ici cinq ans. Reste que la principale source de greffons se fait à partir de donneurs décédés de mort encéphalique (84 % du total). L'objectif de la Journée du 22 juin est de mobiliser tout le monde autour du prélèvement et de consolider le fait que la France a certes des résultats excellents en matière de transplantation. Mais cet état de fait reste sur des valeurs de solidarités qui sont fragilisées à certaines périodes.
Pourquoi l'Agence de biomédecine souhaite-t-elle également s'adresser aux professionnels de santé dans cette campagne de communication ?
La greffe en tant que chaîne et activité transversale est un maillon faible qui peut craquer. Elle représente un équilibre entre des investissements médicaux, des aspects de recherche permanents en matière de transplantation et des activités purement médicales. Quelles sont ces faiblesses potentielles ? D'une part, les directions des établissements peuvent ne plus juger la greffe comme un des éléments prioritaires. D'autre part, le renouvellement des générations de médecins est une problématique importante, dans la mesure où il faut intéresser les jeunes générations, alors que la greffe n'est pas une spécialité médicale et ne dispose pas de pôle spécifique dans les établissements. Pour ma part, je suis issu de l'anesthésie réa et j'ai suivi une formation en greffe qui m'a permis de me spécialiser. J'ai été ensuite président de la commission des greffes aux HCL. Celle-ci a par la suite cessé d'exister. Mais après une chute de l'activité de greffe constatée les années suivantes, nous l'avons relancée.
Est-ce que les jeunes médecins s'intéressent à la greffe ?
En termes de profils de carrières, sans doute pas. Par exemple, un jeune médecin préférera faire de la cardio interventionnelle ou de l'arithmologie que de la greffe cardiaque. Si vous vous spécialisez dans la greffe cardiaque, vous ne pouvez pas partir dans le privé et vous devez rester dans un CHU. Seuls les jeunes les plus motivés vont faire ce choix. Et ce qui est clair, c'est que les jeunes médecins ne souhaitent plus travailler comme les anciennes générations. Ils ne seront prêts à intégrer les équipes de garde que s'ils se trouvent dans des équipes d'au moins cinq médecins.
Où en est la greffe en matière de recherche ?
La situation est aussi problématique dans la recherche, puisqu'il n'y existe pas d'IHU en transplantation. La problématique réside dans la taille de notre pays comparativement aux États-Unis où il nous faut faire des choix d'ordre financier et stratégique. Et malgré tout, en matière de visibilité internationale, la France demeure l'un des pionniers de la greffe. Nous avons fait beaucoup de premières, nos résultats sont excellents. Nous sommes très bien placés au niveau européen. Nous réalisons deux fois plus de greffes en France qu'en Allemagne. En tout cas, sur le terrain, la tendance est au regroupement d'équipes entre petits Chu, afin de maintenir leur activité de greffe. En témoigne l'exemple des hôpitaux de Besançon et Dijon qui ont passé un accord inter-CHU.
Pourquoi est-ce si difficile de maintenir une filière greffe ?
Comme dans les plans cancer, il y a certes eu des investissements dans des plans greffe avec des effets d'accélération. Mais des effets seuils se sont produits. Prenons un exemple : un établissement se donne les moyens de réaliser 20 greffes de poumon par an. Mais il aura ensuite besoin de deux lits de réanimation occupés par les greffés du poumon tous les jours. Il faut donc assurer le suivi des cohortes. Si un établissement décide d'effectuer 100 greffes du foie par an, il devra ensuite suivre 2 000 malades après dix ans de greffe. Or le financement des hôpitaux est annuel en fonction de l'activité. La complexité vient aussi du suivi partagé ville-hôpital. Et encore faut-il que les généralistes et les spécialistes de ville aient la compétence pour suivre ces patients. Au final, le suivi des 57 000 patients déjà greffés doit être structuré. C'est l'une des ambitions du plan greffe III (2017-2021).
Quelle est la tendance qui se dessine dans les années à venir ?
Sachant que la médecin évolue en permanence, des indications vont diminuer et d'autres apparaître. Par exemple pour les greffes de foie avec les nouveaux traitements hépatiques, dans quelques années il n'y aura presque plus d'indications, sauf pour les patients qui auront mal toléré leur traitement ou l'auront arrêté.
D'autre part, le diabète est en train de devenir la première indication de greffe de foie aux États-Unis. La bascule qui va avoir lieu impliquera plus d'endocrinologues et moins d'hépatologues. Nous alerterons les directeurs de CHU et les acteurs de santé afin de mettre en place une organisation adéquate.
Comment est prise en charge la tarification de la greffe ?
Il existe des forfaits T2A pour les séjours. Sinon nous disposons du forfait greffe qui donne une somme globale à chaque établissement pour couvrir les frais non liés à un séjour directement (transport des équipes pour prélever, engagement de suivre le donneur vivant à vie, examens biologiques HLA non remboursés, de plus en plus compliqués et évolutifs). Au final, les modes de financement ne sont pas complètement stabilisés car des innovations apparaissent en permanence. Aujourd'hui pour l'instant, chaque établissement organise ses filières de soins de façon autonome en matière de transplantation.
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