CROI 2022

VIH : le traitement intermittent aussi efficace que la prise continue d’antirétroviraux

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Publié le 18/02/2022
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Lors du Congrès sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI) 2022, les derniers progrès en matière de lutte contre le VIH ont été présentés. À l’instar de résultats de l’essai ANRS QUATUOR, qui montrent que les antirétroviraux sont aussi efficaces en traitement intermittent qu’en prise continue. Par ailleurs, la rémission d'une new-yorkaise séropositive traitée par cellules souches a été décrite.

Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Le traitement d’entretien de l'infection à VIH pourrait être allégé. C’est ce que suggèrent les résultats de l’essai ANRS QUATUOR, publiés dans le Lancet et présentés cette semaine au Congrès sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI) 2022. En effet, d’après cette investigation française, les antirétroviraux seraient aussi efficaces en traitement intermittent (4 jours par semaine) qu’en traitement continu (prise quotidienne).

Réduire les effets indésirables et améliorer l’observance

« L’amélioration de la vie des patients vivant avec le VIH est l’un des axes importants de recherche et l’allègement thérapeutique (associé à une toxicité médicamenteuse moindre et à une observance facilitée, ndlr) en fait partie », rappelle l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS) par communiqué. Ainsi, plusieurs stratégies sont à l’étude : réduction des doses, remplacement des trithérapies par des bithérapies, mise au point de traitements injectables à longue durée d’action.

Cependant, jusqu’à présent, le passage d’un traitement continu à un traitement intermittent n’avait pas été testé. Ainsi, des chercheurs et cliniciens de l’Inserm et de l’AP-HP ont proposé d’explorer cette piste et d’attester de la « non-infériorité » de cette modalité de traitement par rapport au régime continu.

Pas plus d’échec virologique avec un traitement de 4 jours hebdomadaires

Pour ce faire, ont été recrutés fin 2017 « 636 patients adultes infectés par le VIH-1, sous trithérapie antirétrovirale, ayant une charge virale inférieure à 50 copies/mL depuis au moins 12 mois, ne présentant pas de mutations de résistance à l’un des médicaments utilisés et n’ayant pas changé de traitement dans les quatre mois précédant l’inclusion », détaille l’ANRS. Ces volontaires ont ensuite été randomisés pour poursuivre leur traitement habituel soit au rythme quotidien classique soit selon un régime prévoyant 4 jours de prise et 3 jours d’arrêt. Tous ont été suivis pendant 48 semaines.

Résultat : « le régime intermittent n’est pas inférieur au régime continu en ce qui concerne le maintien de la suppression virologique », affirme l’ANRS. De fait, au bout de 48 semaines d’essai, 96 % des patients sous traitement intermittent présentaient toujours une charge virale inférieure à 50 copies/mL – soit à peu près autant (97 %) que dans le groupe traitement continu. En fait, « seuls six patients (2 %) du groupe intermittent et quatre (1 %) du groupe continu ont connu un échec virologique », admet l’ANRS. Des cas liés à l’apparition de mutations de résistances chez trois patients du groupe intermittent et un volontaire du groupe continu.

Amélioration de la qualité de vie et réduction des coûts de traitement

Le traitement intermittent faisait par ailleurs aussi bien, voire mieux, que le traitement continu en termes de tolérance. « Les effets indésirables sévères (grades 3-4) étaient observés chez 9 % des patients du groupe intermittent et 12 % des patients du groupe continu », se félicite l’ANRS.

Au-delà de la seule question de sa sécurité, ce régime intermittent apparaît même associé à une meilleure observance, à une meilleure acceptabilité, et à une une bien meilleure qualité de vie. « 59 % des patients du groupe intermittent ont vu leur qualité de vie améliorée, contre 7 % du groupe continu », confirme l’agence.

À noter un autre « bénéfice notable de cette stratégie » : la réduction du coût des traitements antirétroviraux. Leur montant annuel moyen passerait de fait « de 7 207 euros dans le groupe continu à 4 127 euros dans le groupe intermittent » - soit une baisse de 43 %.

Une "patiente de New York" après le "patient de Berlin" et le "patient de Londres" ?

Mais l’étude QUATUOR n’est pas la seule à avoir fait parler d’elle à la CROI 2022. Parmi les présentations qui ont marqué l’attention, compte aussi celle du cas d’une patiente new-yorkaise potentiellement en rémission de son infection à VIH suite à une transplantation de cellules souches, rapporte NAM, association anglaise de lutte contre le VIH et le SIDA. 

En effet, comme le "patient de Berlin" et le "patient de Londres", premiers en rémission de leur infection suite à une telle transplantation, cette personne VIH + était également atteinte de leucémie et de ce fait éligible à une greffe de cellules souches hématopoïétiques, selon NAM.

De plus, comme pour les deux premiers volontaires européens, des cellules souches présentant une mutation CCR5-delta-32 associée à une absence de corécepteurs CCR5 du VIH auraient été trouvées. Nouveauté : ces cellules CCR5-delta-32, issues de sang de cordon, auraient été combinées à des cellules souches d’un parent donneur sans mutation partiellement compatible (greffe haplo-identique).

Après cette transplantation, la patiente serait restée sous antirétroviraux pendant 3 ans avant de tenter une interruption de traitement. 14 mois plus tard (soit plus de 4,5 ans après la transplantation), elle resterait séronégative avec une charge virale indétectable.


Source : lequotidiendumedecin.fr