Introduire de nouveaux délits pour mieux lutter contre les dérives sectaires en santé : tel est l'un des objectifs d'un projet de loi présenté ce 15 novembre, qui s'inscrit plus largement dans le cadre d'une stratégie nationale pluriannuelle.
Présenté en conseil des ministres par la secrétaire d'État chargée de la Citoyenneté Sabrina Agresti-Roubache, ce projet part d'un constat simple : les dérives sectaires ont changé de visage depuis la loi About-Picard de 2001, avec une « multiplication par deux des signalements à la Miviludes (mission de lutte contre les sectes) » (4 020 en 2021) et une « transformation » de leur nature, explique-t-on de source ministérielle.
Avec la crise sanitaire du Covid-19 et le développement des réseaux sociaux, « on a vu apparaître des gourous 2.0 qui fédèrent de véritables communautés », ajoute-t-on.
Réformer le cadre de 2001
Le projet de loi se veut une réforme majeure des outils juridiques de 2001. Il prévoit de créer un nouveau délit pour « réprimer directement les actes visant à placer ou maintenir une personne en état de sujétion psychologique, par l’exercice direct de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer le jugement, quand cette situation aboutit à une dégradation grave de la santé ou conduit la victime à des agissements qui lui sont gravement préjudiciables ». Les peines encourues seraient de trois ans d'emprisonnement et 375 000 euros d'amende
Le texte veut aussi reconnaître une « circonstance aggravante » lorsque des délits (violences, escroqueries, meurtres…) sont commis dans un contexte sectaire, en état de sujétion psychologique ou physique.
Faciliter les sanctions disciplinaires contre les praticiens déviants
Alors que 25 % des saisines de la Miviludes concernent le domaine de la santé, le texte veut aussi créer un délit de « provocation à l'abandon ou à l'abstention de soins, ou à l'adoption de pratiques exposant à un risque grave pour la santé ». L’infraction nouvelle doit ainsi faciliter la poursuite et la répression de la promotion, auprès de publics souvent fragiles, de pratiques faussement présentées comme bénéfiques pour la santé alors qu’elles sont particulièrement dangereuses. La peine encourue serait de 15 000 euros et un an d'emprisonnement. « C'est un sujet de santé publique, avec des conséquences qui peuvent être très graves » , explique-t-on au ministère.
Le projet de loi veut aussi « faciliter les sanctions disciplinaires pour les praticiens déviants », avec la transmission obligatoire des condamnations et placements sous contrôle judiciaire aux ordres professionnels.
Enfin, sont prévus un meilleur accompagnement des victimes et un agrément ministériel donné à un plus grand nombre d'associations pour qu'elles puissent se porter partie civile, dans les procédures judiciaires en lien avec les pratiques sectaires.
Une campagne de communication à venir
Ce projet de loi s'inscrit dans la stratégie nationale pluriannuelle de lutte contre les dérives sectaires qui comporte une quarantaine de mesures. Une campagne de sensibilisation est prévue dans les prochains mois, tandis que des programmes de lutte contre les dérives sur les réseaux sociaux et d'amélioration de l'accompagnement des victimes seront développés en parallèle.
Si ces mesures n'ont pas été chiffrées, le ministère de l'Intérieur précise que depuis 2021, un million d'euros de subventions a été débloqué chaque année pour les associations d'aide aux victimes.
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