LE QUOTIDIEN : Quel est selon vous l’élément clé pour agir sur la qualité des logements ?
OLIVIER TOMA : Avant même de se lancer dans un projet de construction, il faut commencer par une réflexion portant sur l’écoconception du bâtiment. En France, la démarche reste rare, car les architectes ne sont pas nécessairement formés à cette approche. Un exemple simple : dans le cadre du tri sélectif, il existe actuellement trois à quatre flux. Dans dix ans, on peut supposer qu’il y en aura plus. Si les architectes n’intègrent pas, dès à présent, la mise en place de circuits de collectes en prévision des évolutions à venir, les bâtiments seront rapidement obsolètes dans leur agencement.
Sans faire de prospective, pour les logements neufs comme pour l’ancien, la priorité repose sur la qualité sanitaire des matériaux de construction qui, aujourd’hui, n’est absolument pas prise en compte. Outre l’importance d’acheter des matériaux locaux afin d’agir sur l’empreinte carbone – qui a elle seule génère de nombreux problèmes de santé –, il est impératif de s’interroger sur les composés organiques volatiles (COV) rejetés dans l’air par ces matériaux de construction, qui impactent la qualité de l’air intérieur. Il est par exemple aberrant que certains faux plafonds soient encore composés d’urée formaldéhyde, une colle qui, au-delà de 25 degrés, émet des COV, se transformant en agents chimiques cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR). Sans parler des revêtements de sol contenant des perturbateurs endocriniens, comme les phtalates. Pour agir dans ce domaine, il faut former les acheteurs et les concepteurs de bâtiments, qui doivent être capables de lire une fiche de déclaration environnementale et sanitaire.
La ventilation des logements est également un point majeur…
Effectivement, il faut promouvoir l’intervention de spécialistes de la ventilation, ce qui, une fois de plus, reste relativement rare. Dans les logements, les systèmes de ventilation fonctionnent sur une logique on/off. Or, les locaux doivent être ventilés en fonction de leur occupation, ce qui implique des capteurs de COV et de CO2. Malheureusement, en France, ce n’est encore que trop peu déployé. En cause ? Le coût à l’investissement. Pourtant, tout ce qui touche à la RSE est nécessairement rentable sur le moyen et le long terme.
Quel rôle les professionnels de santé peuvent-ils jouer dans ce domaine ?
A condition d’être formés, ils peuvent faire passer des messages à leurs patients. Par exemple, la qualité de l’air intérieur ne repose pas uniquement sur les composés des matériaux de construction. Il faut également bannir tout ce qui est incandescent : huiles essentielles, encens, diffuseurs, tabac… Tous ces composés sont allergènes. Comme l’air intérieur est sept fois plus pollué que l’air extérieur, il est utile d’ouvrir les fenêtres pour aérer le logement deux fois par jour, sauf bien entendu pour les nouveaux bâtiments construits avec des ventilations à double flux.
Ils peuvent également faire de la prévention sur l’exposition aux risques chimiques. On pense souvent à tort que pour désinfecter, il faut de la chimie. Or, de nombreux produits d’entretiens impactent la qualité de l’air et peuvent aussi entraîner des éruptions cutanées, sans parler des rejets dans les égouts. Les médecins doivent être formés et se former à ces enjeux, pour devenir des vecteurs de conseils et d’éco-gestes pertinents vis-à-vis de leurs patients.
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