« Il ne semble pas pertinent de chercher à augmenter les apports en fer pour l’ensemble de la population. » Dans le même esprit, « le dépistage de la carence en vitamine D (…) n’a pas lieu d’être pratiqué en population générale ». Dans un avis publié le 20 septembre 2022, le Haut conseil de la Santé publique (HCSP) invite à garder la main légère non seulement en matière de dépistage des insuffisances et carences, mais aussi vis-à-vis de la supplémentation en ces deux nutriments.
En fait, l’instance a réévalué la couverture des besoins nutritionnels en fer et vitamine D des Français « dans le cadre de la mise à jour des repères nutritionnels pour la population française », résume-t-elle. Pour ce faire, elle a auditionné divers experts et s’est surtout penchée sur la littérature concernant le statut en fer et en vitamine D des Français, les effets sanitaires potentiels d’une déficience ou d’un excès en ces nutriments, l’effet des politiques de prévention menées dans l’Hexagone ou à l’étranger, etc. A noter que « le présent avis concerne exclusivement (…) la population générale adulte et non les questions en lien avec des pathologies, ou des populations spécifiques comme les femmes enceintes et allaitantes, les enfants ou les personnes plus âgées ».
Résultat : sans surprise, « pour le fer, le risque de non-couverture des besoins se pose principalement les femmes en âge de procréer en raison des menstruations », indique le HCSP.
Concentrer la prévention de l’anémie sur les femmes les plus à risque
Ceci étant dit, seule une minorité de ces femmes sont effectivement concernées par la carence martiale. Car globalement, « la fréquence des anémies ferriprives de l’ordre de 3 % chez les femmes en âge de procréer en France métropolitaine », souligne le HCSP. En fait, les anémies ferriprives apparaissent « nettement plus fréquentes » dans quelques sous-populations à risque, comme les femmes de faible niveau socio-économique ou vivant dans les départements d’outre-mer. Les patientes multipares ou sous stérilet sont par ailleurs concernées, ajoute l’agence.
Ainsi, pour le HCSP, il « ne semble pas pertinent de chercher à augmenter les apports en fer pour l’ensemble de la population ». D’autant qu’une supplémentation en fer pourrait avoir des effets négatifs, notamment sur le risque de diabète, de cancer ou de maladies cardio-vasculaires.
En fait, le HCSP propose « de concentrer les mesures de prévention sur les groupes à risques d’anémies ferriprives ». « Vis-à-vis des femmes en âge de procréer à risque élevé, il apparaît intéressant de coupler un dépistage et une éventuelle supplémentation martiale (limitée dans le temps) : dépistage orienté par les facteurs de risque et un tableau clinique évocateur. »
6,5 % de la population carencée en vitamine D
De même, pour la vitamine D – qui « provient à 80-90 % de la biosynthèse cutanée sous l’effet des rayonnements ultraviolets (UV) du soleil versus 10 à 20 % provenant d’une source exogène (alimentaire) », rappelle le HCSP – les besoins sont relativement bien couverts. Certes, la proportion de la population générale en insuffisance (< 20 ng/mL) était encore de près de 35 % en 2015, cependant, concernant les carences (< 10 ng/mL), le chiffre tombe à 6,5 %.
Et encore une fois, certains groupes apparaissent bien plus à risque que d’autres. Le HCSP pointe surtout, « les personnes en situation de précarité, les personnes obèses, les personnes ne s’exposant pas au soleil (personnes vivant en institution ou portant des vêtements très couvrants), les personnes à peau très pigmentée vivant sous des latitudes élevées » ou encore les sujets atteints de certaines maladies chroniques ou sous certains traitements (corticothérapie, anticonvulsivants, etc.).
Pas de supplémentation systématique même dans les groupes à risque
Ainsi, alors que l’hiver approche – et avec lui la question de la supplémentation – le HCSP ne conseille pas de dépister les carences et de supplémenter en vitamine D dans toute la population adulte. D’autant qu’en matière de dépistage, « des réserves sont apportées du fait de la qualité et de la validité des dosages, et de l’hétérogénéité dans la définition des différents seuils relatifs au statut en vitamine D » et que concernant la supplémentation, « aucun essai randomisé bien conduit (n’en) confirme l’intérêt ».
Au total, le HCSP recommande, en population générale, de « promouvoir un mode de vie sain et favorable au statut en vitamine D », avec une exposition solaire adaptée et une consommation d’aliments riches en vitamine D – « poissons gras à hauteur toutefois d’une portion par semaine, œufs, fromages et produits laitiers 2 par jour », rappelle l’autorité sanitaire. En outre, l’instance préconise d’éviter l’automédication à base de compléments alimentaires riches en vitamine D, « le risque potentiel de consommation de fortes doses (de ce genre de produits) étant encore inconnu à l’heure actuelle ».
Même dans les groupes à risque, « on ne dispose pas actuellement de données scientifiques suffisantes pour recommander une supplémentation systématique », indique le HCSP. Cependant, dans ces publics, « la tâche revient aux professionnels de santé de surveiller le statut en vitamine D » et de « se référer aux tableaux des doses appropriées en cas de prescription d’une supplémentation », estime le HCSP.
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