Annoncé le 11 mars dernier par la structure REACting, l'essai clinique européen Discovery évaluant l'efficacité de plusieurs lignes de traitement dans la prise en charge de la maladie Covid 19 a commencé ce dimanche 22 mars, selon une annonce faite par le Pr Jérôme Salomon, directeur général de la Santé.
Contrairement à ce qui avait été annoncé à l'origine, l'hydroxychloroquine fera finalement partie des traitements évalués, à la suite des résultats préliminaires mais prometteurs communiqués par le Pr Didier Raoult, directeur de l'Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection, à Marseille.
Prévu pour porter sur 3 200 patients, cet essai clinique européen (France, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Royaume uni, Allemagne et l’Espagne) inclura au moins 800 patients français atteints de formes sévères du COVID-19. Piloté par le Dr Florence Ader, du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital de la Croix-Rousse au CHU de Lyon et chercheuse au Centre international de recherche en infectiologie CIRI, l'essai comprendra donc 5 bras de traitement : soins standards, soins standards + remdesivir, soins standards + lopinavir/ritonavir, soins standards + lopinavir/ritonavir + interféron bêta et enfin soins standards + hydroxychloroquine.
Un essai adaptatif
« La grande force de cet essai est son caractère " adaptatif ", explique Florence Ader. Cela signifie que très rapidement les traitements expérimentaux inefficaces pourront être abandonnés et remplacés par d’autres molécules qui émergeront de la recherche. Nous pourrons donc réagir en temps réel, en cohérence avec les données scientifiques les plus récentes, afin de mettre en évidence le meilleur traitement pour nos malades ».
Cinq hôpitaux français participeront au départ (hôpital Bichat à l'AP-HP, Lille, Nantes, Strasbourg, Lyon). L'essai sera ensuite progressivement ouvert à d’autres centres pour arriver au moins à une vingtaine d’établissements participants. Cet essai va par ailleurs complémenter les données qui seront recueillies au cours d’un autre essai clinique international qui va bientôt commencer sous l’égide de l’Organisation Mondiale de la Santé, baptisé « Solidarity ».
L'hydroxychloroquine, invitée de dernière minute
Lors de son point presse, le Pr Jérôme Salomon a justifié l'inclusion de la chloroquine par la publication des « résultats intéressants qui sont d'ailleurs publiés ce jour dans "International Journal of Antimicrobial Agents" ». Les autorités estiment qu'avant de pouvoir éventuellement généraliser ce traitement non dénué d'effets secondaires, ces premiers résultats encourageants doivent être confirmés dans une étude randomisée plus large.
Dans cette étude, le Pr Raoult et ses collègues rappellent les précédents résultats in vitro obtenus par d'autres équipes contre le SARS-CoV-1 en 2003 : une efficacité de 50 % (c'est-à-dire une réduction de moitié de la charge virale) à une dose d'environ 8 µmol dans une culture cellulaire. « Ces résultats ont été oubliés parce que l'épidémie de SRAS a pris fin pour des raisons encore non éclaircies, expliquent les auteurs [...] Depuis le début de l'épidémie du nouveau coronavirus, la chloroquine a été testée in vitro en Chine, et une efficacité de 50 % était atteinte avec une dose de 1,1 µmol ». Par ailleurs, des données préliminaires chez des patients chinois semblent confirmer ces résultats in vitro.
Au cours de l'étude française, les médecins marseillais ont pris la décision d'ajouter ou non de l'azithromycine en fonction de la présentation clinique. Bien que l'étude ne fût pas randomisée, une comparaison a pu être faite avec les dossiers de plusieurs patients pris en charge au CHU de Nice, ainsi qu'avec des patients qui ont refusé d'entrer dans l'expérimentation.
Sur les 36 patients inclus dans l'étude, 6 étaient asymptomatiques et 22 présentaient des symptômes liés à une infection des voies aériennes supérieures, et 8 présentaient des symptômes associés à une infection de voies respiratoires inférieures. Le traitement a été administré à 26 patients, comparés à 16 contrôles (10 ayant refusé l'hydroxychloroquine et 6 d'autres centres).
Des résultats encourageants, mais des perdus de vue
Cinq jours après le début de la prise en charge, plus aucun patient traité par l'association hydroxychloroquine/azithromycine ne présentait de virémie Covid-19 dans leurs prélèvements rhino-pharyngés. La moitié de ceux traités par une monothérapie d'hydroxychloroquine avait une charge virale indétectable par rapport à 20 % des patients du groupe contrôle.
Il est important de préciser qu'aucun des patients ne présentait de forme grave au début de l'étude, et qu'il n'y a eu des patients qualifiés de « perdus de vus » que dans le groupe traité : un patient décédé de cause non précisée 3 jours après son inclusion, (mais dont le test PCR était négatif un jour avant), un autre patient a quitté de lui-même l'hôpital et un autre qui a dû arrêter le traitement pour nausées.
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