La versatilité du VIH est l’obstacle majeur qui empêche son éradication et la mise au point d’un vaccin.
Un espoir était cependant apparu lors de la découverte, chez quelques patients, d’anticorps bNAbs (pour broadly neutralizing antibodies) capables de neutraliser le virus quel que soit son niveau de mutation. Cependant, personne n’était encore parvenu à amplifier spécifiquement les lymphocytes produisant de tels anticorps tout en gardant leur capacité à s’attaquer à une grande variété de virus en perpétuelle mutation.
Des chercheurs ont formulé une hypothèse : pourquoi ne pas appliquer une stratégie prime boost, avec un premier antigène qui provoque l’amplification d’une famille de lymphocytes B recrutés alors avant la maturation des anticorps avec un antigène spécifique de la « germline » des anticorps puis, avec un autre antigène, guider la maturation des anticorps pour qu’ils neutralize les multiples versions du virus.
Une vaccination en deux temps
Le Dr Pia Dosenivic, de l’Université new-yorkaise de Rochester, aidée de collaborateurs de plusieurs centres de recherches (MIT, Université Cornell, université d’Amsterdam, université de Washington…) a vérifié cette hypothèse chez deux lignées de souris génétiquement modifiées pour produire uniquement des anticorps normaux (souris GLVh) ou uniquement des précurseurs de bNAbs (souris MuVh).
Chez les souris GLVh, l’utilisation d’antigènes BG505 SOSIP.664, un trimère issu de la capside du virus amplifiait les lymphocytes B, mais sans que ces derniers ne produisent de bNAb et n’avaient donc aucune efficacité contre les VIH-1. Une immunisation par l’eOD-GT8 60mer, un antigène synthétique, ne parvenait pas à amplifier les lymphocytes B et ne provoquait donc pas de réponse immunitaire dirigée contre le VIH-1. Chez les souris GLVh, le BG505 provoquait bien une multiplication du nombre de lymphocytes B mais sans susciter de neutralisation du VIH-1, alors que seul l’eOD-GT8 60mer provoquait une production importante de bNAbs qui protégeait les animaux contre l’infection par le VIH.
Antigène normal ou synthétique
Tandis que le Dr Dosenivic démontrait le besoin d’une immunisation réalisée en deux temps, deux autres équipes travaillaient sur le choix des antigènes à utiliser lors de chaque étape. Deux articles publiés dans « Science », s’intéressaient aux deux candidats antigènes : le eOD-GT8 60mer pour guider la maturation des anticorps et l’eOD-GT8 60mer pour amplifier les lymphycite B produisant des VRC01, connus pour s’attaquer à plus de 90 % des souches de VIH-1. Les auteurs des deux études sont parvenus à des résultats contrastés mais prometteurs chez le lapin et la souris.
« Ces articles sont très intéressants », estiment le Dr Morgane Bomsel qui dirige l’équipe « Entrée muqueuse du VIH et immunité muqueuse » de l’Institut Cochin, « c’est un travail de haute voltige, mais ils n’étudient cependant qu’un anticorps particulier : l’IgG VRCO1. Il faudrait poursuivre les travaux avec les autres anticorps de VG02, VG03, jusqu’à VG16. » Pour la chercheuse qui a publié en 2011 des résultats encourageants d’une étude de phase I sur un vaccin anti-VIH MYM-101, ciblant les muqueuses génitales et anales de la femme, il faudrait aussi vérifier l’immunité réelle accordée par cette stratégie prime Boost : « iI est dommage que les auteurs n’en aient pas profité pour vérifier in vivo la protection des animaux vis-à-vis d’une infection par le VIH. On est encore loin d’un vaccin je crois, bien que ces études soient des progres sur la compréhension de l’établissement d’une réponse immune. » Une autre question à la quelle il faudra répondre, les antigènes OD-GT8 60mer et BG505 SOSIP.664 fontionnent-ils avec tous les types de bNAbs identifiés à ce jour ?
Rogier Sanders et al, HIV-1 Neutralizing Antibodies Induced by Native-like Envelope Trimers, Science, publication en ligne du 18 juin 2015
Pia Dosenovic et al, Immunization for HIV-1 Broadly Neutralizing Antibodies in Human Ig Knockin Mice, Cell 18 juin 2015
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