Neuf ans après, l'accident nucléaire de Fukushima du 11 mars 2011 ne semble pas avoir entraîné de conséquences sanitaires directement liées aux radiations. Des effets indirects sont toutefois constatés. L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui suit de près les différentes études épidémiologiques et de suivi sanitaire mises en place aux lendemains de l'accident, dresse un bilan de cette surveillance.
« Après l'accident de Tchernobyl, une augmentation non négligeable des cancers de la thyroïde a été observée, c'est pourquoi les Japonais ont lancé très rapidement des études de surveillance, explique au « Quotidien » Enora Cléro, épidémiologiste à l’IRSN. Toutefois, le niveau de dose des rayonnements liés à l'accident de Fukushima est beaucoup plus faible que pour celui de Tchernobyl. Nous nous attendons donc à des conséquences moindres et plus tardives. »
Campagnes de dépistage du cancer de la thyroïde
Une enquête réalisée auprès des plus de 2 millions d'habitants de la préfecture de Fukushima a permis d'estimer que la plupart des individus n'ont pas été exposés à une dose externe de plus de 2 mSV durant les 4 mois suivant l'accident. « À titre comparatif, nous estimons que les Français sont exposés à une dose de 4,5 mSv par an », précise Enora Cléro.
Des campagnes de dépistage des cancers de la thyroïde visant les quelque 360 000 enfants présents dans la préfecture de Fukushima et âgés de moins de 18 ans au moment de l'accident ont été menées successivement sur les périodes octobre 2011-mars 2014, avril 2014-mars 2016, avril 2016-mars 2018 et avril 2018-mars 2020. Ce dépistage repose sur la réalisation d'une échographie de la thyroïde. Un nombre élevé de nodules tumoraux de la thyroïde, sans expression clinique, et quelques cas de cancers thyroïdiens ont été rapportés (101 cas détectés avec la première campagne, 52 nouveaux cas lors de la deuxième, 24 lors de la troisième et 8 lors de la quatrième). Toutefois, les données obtenues dans des zones non exposées montraient des taux similaires.
« À ce stade, nous pensons donc qu'il s'agit d'un effet lié au dépistage plutôt qu'aux radiations, estime Enora Cléro. Le dépistage entraîne un surdiagnostic et des traitements qui auraient pu être évités, alors que les cancers thyroïdiens radio-induits, de type folliculaire et papillaire, peuvent rester sans expression clinique pendant plusieurs années, sont de bon pronostic et associés à une faible létalité. »
De fait, la réalisation quasi systématique d'une ablation chirurgicale en cas de nodule tumoral durant les trois premières années qui ont suivi l'accident a laissé place à une surveillance échographique de l'évolution du nodule.
Un risque accru de diabète
Les 210 000 personnes évacuées des zones les plus exposées aux retombées radioactives peuvent par ailleurs bénéficier annuellement d'un bilan médical approfondi. Dans l'ensemble, les résultats montrent une amélioration de l'état de santé de ces personnes avec le temps, état de santé qui a pu être dégradé dans les mois suivant l'accident. Les personnes exposées sont aussi moins sujettes à l'anxiété. « Les changements de vie quotidienne et les conditions de stress qui ont affecté les personnes les plus exposées ont des conséquences sanitaires délétères, comme un risque accru de diabète. Il s'agit d'effets indirects de l'accident nucléaire », souligne Enora Cléro.
Les données de suivi des femmes enceintes entre août 2010 et juillet 2011 montrent qu'en 2011 et 2017, le taux de prématurité, de bébé de petits poids et d'anomalies congénitales est resté stable, avec des taux similaires à ceux de la population générale.
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