Saisi par la Laiga, l’association libre des gynécologues italiens pour l’application de la loi sur l’avortement, le Conseil de l’Europe vient d’infliger un carton rouge à l’Italie pour violation du droit à l’IVG. Dans sa plainte déposée au printemps dernier, l’organisation avait dénoncé le nombre croissant de gynécologues objecteurs de conscience proche des 90 % dans certaines régions.
Elle avait aussi évoqué un phénomène identique au niveau du personnel paramédical. Enfin, la Laiga dénonçait l’absence de mesures garantissant la présence permanente de médecins hospitaliers non objecteurs dans le service public.
Dans la pratique, la loi n’est quasiment plus appliquée
Officiellement, l’Italie n’a pas encore emboîté le pas à l’Espagne où le gouvernement a adopté en décembre dernier, un dispositif prévoyant la suppression du droit à l’avortement. Selon ce projet, les IVG seront autorisées seulement en cas de viol ou dans le cadre d’un contexte médical dangereux pour la mère.
Pourtant, ce ne sont pas les pressions qui manquent du côté italien. Les parlementaires proches des mouvances catholiques, les associations pro-vie et le Vatican montent ponctuellement au créneau pour réclamer une révision de la loi 194 adoptée par référendum en 1978.
Jusqu’à présent, ni le gouvernement ni le parlement n’ont osé s’aventurer sur un chemin aussi tortueux. Mais dans la pratique, la loi n’est quasiment plus appliquée comme le dénoncent ponctuellement les associations pro-avortement.
À la mi-mars par exemple, le cas d’une jeune femme ayant dû avorter seule dans les toilettes d’un hôpital romain a défrayé la chronique de l’autre coté des Alpes. Après lui avoir administré un traitement pour déclencher les contractions, les médecins objecteurs de conscience de service ce jour-là, ont refusé de l’assister.
Près de 80 % des gynécologues refusent
Selon un rapport publié au printemps dernier par l’Institut italien de statistiques (ISTAT), au niveau national 80 % des gynécologues et 50 % des anesthésistes et infirmiers refusent de pratiquer les IVG. Dans certaines régions comme le Latium, l’ISTAT a enregistré 90 % de spécialistes objecteurs de conscience. Dans le sud, le scénario est identique voire pire.
À Bari, chef lieu des Pouilles, les deux gynécologues qui acceptaient encore de pratiquer des IVG ont jeté l’éponge au printemps dernier après avoir été pendant plusieurs mois, la cible privilégiée des associations pro-vie et de leurs collègues qui les accusaient d’assassinat. À Naples, un seul service hospitalier est encore ouvert et en Sicile, le taux d’abstention des spécialistes frôle la barre des 80,6 %. Dans ce mauvais film, les femmes privées du droit de disposer de leur corps et de leur volonté comme le soulignent les associations pro-Ivg, ont le choix entre deux solutions : les pratiques clandestines ou l’étranger.
À l’automne dernier, les démocrates et les députés du Mouvement « 5 stelle » crée en 2009 par le comique Beppe Grillo avaient demandé au parlement d’adopter un dispositif d’urgence introduisant l’obligation pour les hôpitaux publics, de garantir le droit à l’IVG. Dans un document, ces députés réclamaient des recrutements pour garantir la présence de médecins non objecteurs de conscience 24 heures sur 24.
En parallèle, les députés invoquaient l’ouverture de plannings familiaux. Mais ces requêtes sont restées lettre morte en raison du changement de gouvernement et des pressions des lobbies pro-vie. Avec le carton rouge infligé par Bruxelles qui s’ajoute à trois autres amendes, l’exécutif pourrait finalement prendre le dossier en main.
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