• Pourquoi regrouper le CHU de Nantes sur un site unique ?
Le CHU de Nantes (3 060 lits et places, 10 000 salariés) est réparti sur trois sites principaux : l’Hôtel-Dieu, dans le centre, le site Laennec, sur la commune de Saint-Herblain (au Nord), et Saint-Jacques, au Sud Loire. L’idée, en réunissant l’Hôtel-Dieu et Laennec, est de faire « un grand pôle MCO hospitalo-universitaire regroupant le soin, l’enseignement et la recherche », s’enthousiasme le président de la CME. Supprimer les transports entre les sites dégagera 30 millions d’euros par an, complète la directrice générale.
L’idée du regroupement, assez consensuelle, ne sonne pas comme une évidence aux yeux de tous. Les bâtiments vieillissent mais ne sont pas obsolètes : l’Hôtel-Dieu a ouvert en 1967, Laennec, en 1984. « Les Nantais s’interrogent car des millions ont été récemment engloutis pour rénover le SAMU et le pôle mère-enfant », note ainsi Gilles Brunot, ancien administrateur CGT du CHU. Un nouveau plateau technique va ouvrir en 2013.
• Pourquoi implanter le CHU sur l’île de Nantes ?
C’est le cœur de la polémique. Les détracteurs de Jean-Marc Ayrault lui reprochent de n’avoir jamais envisagé à fond un plan B, tel que le regroupement au Nord, sur Saint-Herblain. Des syndicats de personnel y sont favorables, de même que l’UMP et le maire de Saint-Herblain, Charles Gautier. Un socialiste, en opposition ouverte avec Jean-Marc Ayrault : « Un seul scénario a été étudié. La directrice générale du CHU m’a dit que c’est le meilleur, mais comment la croire dès lors qu’elle est capable de présenter un budget non sincère ? ».
« L’avenir est au développement des transports en commun, pas au parking en périphérie », estime le président de la CME du CHU. Pas convaincu, le président du Conseil de l’ordre des médecins de Loire-Atlantique regrette que le débat ne soit pas ouvert à tous les professionnels de santé. Les ambulanciers privés, inquiets, rappellent que les cliniques nantaises sont toutes implantées en périphérie : « L’île est d’ores et déjà saturée par le trafic. L’accès à l’hôpital sera impossible ». Autre question : l’île est-elle inondable ? Géographe, Paul Fattal l’affirme et se dit perplexe. « À moins de prévoir des installations susceptibles de résister à des hauteurs d’eau de plus de 2 mètres ».
Basé au Nord, l’Institut de cancérologie de l’Ouest entend bien y rester. Jamais le cyclotron ne logera sur l’île, fait-il valoir. L’ARS évalue la possibilité de le laisser seul sur Saint-Herblain. « Médicalement, ce serait un suicide », affirme ce PU-PH nantais.
• Combien coûtera l’opération, et qui paiera ?
En 2011, Xavier Bertrand évaluait le projet à 940 millions d’euros. Aujourd’hui, la DG Christiane Coudrier parle de 860 millions d’euros, pour le CHU seul. Un coût qui n’intègre pas les ponts, les routes, les transports, le déménagement du marché d’intérêt national... L’hôpital, pour se reconstruire à neuf, puisera dans ses réserves et empruntera beaucoup. Une aide externe sera nécessaire, estimée à 253 millions d’euros. « Cette aide est la seule variable d’ajustement en cas de dérive des coûts », observe, dubitative, la chambre régionale des comptes.
L’IGAS, favorable au scénario île de Nantes, rappelle toutefois que le CHU a souscrit plusieurs emprunts structurés, donc à risque (rapport juillet 2011). Aujourd’hui, la chambre régionale des comptes va plus loin. Elle considère que le transfert sur l’île ne peut s’envisager sans de nouvelles économies et une baisse des effectifs (530 postes soignants sont mentionnés).
• Le projet est-il correctement dimensionné ?
La baisse programmée du nombre de lits (-9 %) mécontente les syndicats de personnel. « On craint une dégradation des conditions de travail et un nouveau plan social », dit Jérôme Gauvain (CFTC).
Aux yeux d’un expert hospitalier, il faut se projeter en 2030 et fermer la moitié des lits, pour se rapprocher des standards américains. « Sur le papier c’est un beau projet qui fait rêver. Mais ça me paraît démesuré. Un gouffre », note cet autre observateur. « Une gabegie financière », ajoute une ancienne élue nantaise. Le président de la CME du CHU admet que le montage repose sur un pari, celui de la progression constante de l’activité, afin de neutraliser la baisse tarifaire. « Un challenge quotidien et annuel », selon le Pr Potel.
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
Dès 60 ans, la perte de l’odorat est associée à une hausse de la mortalité
Troubles du neurodéveloppement : les outils diagnostiques à intégrer en pratique
Santé mentale des jeunes : du mieux pour le repérage mais de nouveaux facteurs de risque