Quelles mesures vous semblent majeures parmi toutes celles présentées par la ministre ?
Pr Serge Gilberg Le pilotage de la politique vaccinale avait besoin d’être repensé. Le fait qu’il ait un engagement des pouvoirs publics dans la politique vaccinale, le fait qu’il existe désormais un relais institutionnel sont indispensables. Et c’est d’ailleurs un besoin exprimé par les généralistes qui se sentent un peu seuls quand il s’agit de faire face à des réticences de vaccination.
L’autre aspect fondamental concerne l’amélioration de l'information des professionnels de santé. Cela répond à un besoin car les moyens actuels sont un peu dépassés.
Un site spécifique est bienvenu car il simplifierait les recherches. De même pour les bulletins trimestriels. Mais il est nécessaire que l’information soit immédiatement lisible par tous. Et tout cela suppose la participation de médecins en exercice, et parmi eux des médecins généralistes.
Le carnet de vaccination électronique accessible depuis le dossier médical personnel vous semble-t-il susceptible d’améliorer la couverture vaccinale ?
Pr S. G. C’est en tout cas un point indispensable pour améliorer la traçabilité de la vaccination d’un patient. Toute la question est de savoir à quelle échéance cette mesure sera effective. À l’heure actuelle les médecins ont surtout besoin de logiciels d’accès simples et gratuits d’aide à la décision vaccinale. Les recommandations évoluent très vite dans ce domaine et il existe des multitudes de situations. De tels logiciels permettraient une réponse très rapide et complètement actualisée.
La ministre a beaucoup insisté sur la mise en place d’un comité des parties prenantes regroupant experts, médecins et usagers. Qu’en pensez-vous ?
Pr S. G. Les politiques doivent prendre l’avis des citoyens, c’est certain. On peut avoir des concertations mais la vaccination est avant tout une question d’expertise. Dès lors qu’on recommande un vaccin, il faut politiquement le défendre. Il ne faudrait pas que ce type de décision soit renvoyé au débat public. Et ouvrir une concertation sur l’obligation vaccinale ne me semble pas être une priorité aujourd’hui.
L’action sur les ruptures de stocks n'arrive-t-elle pas tardivement ?
Pr S. G. Agir sur les ruptures de stocks est incontestablement une bonne chose. Mais cette mesure ne suffit pas. Il faudrait aller plus loin et répondre aux besoins en vaccins qui ne sont pas pourvus. Notamment, il serait très utile de disposer d’un vaccin monovalent contre la coqueluche que nous réclamons depuis des années au CTV. Nous sommes contraints d’adapter sans cesse la politique vaccinale à la production des industriels ou aux arrêts brutaux de commercialisation.
En tant que membre du CTV, que pensez-vous de son transfert à la HAS ?
Aujourd’hui le CTV manque de moyens pour la recherche documentaire, le secrétariat, de temps dédié à la recherche, etc. Le fait de le rattacher à la HAS va peut-être combler ces lacunes. Sa composition doit rester pluridisciplinaire et la médecine générale doit être fortement représentée. Mais, attention, il ne faudrait pas multiplier les lieux de décision concernant les recommandations vaccinales. Je me méfie des millefeuilles administratifs.
*Membre du CTV, directeur du département de médecine générale à Paris-Descartes.
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