Le Covid-19 vu de Belgique : « Nous craignons une vague de complications pour nos patients chroniques »

Publié le 10/04/2020

Dans le cadre d’un dossier, Le Généraliste a interrogé des médecins de famille du monde entier pour savoir comment ils vivent la pandémie de coronavirus. Voici l’un des témoignages.

"Au début de l’épidémie, on nous a demandé d’éviter le plus possible les contacts avec les patients. Nous faisons surtout de la consultation téléphonique, nous nous sommes un peu transformés en call center. Nous ne voyons les patients que si c’est indispensable. Dans le cabinet où je travaille, nous faisions encore de nombreuses consultations libres sans rendez-vous, elles ont donc été arrêtées, pareil pour les visites à domicile. Nous avons reçu comme consigne d’isoler les gens pendant sept jours dès le moindre signe de virose. Nous avons un peu peur, pour être honnête. Une consultation par téléphone ne remplace pas une consultation de visu car les autres pathologies sont encore présentes. On se dit qu’on va peut-être passer à côté de pneumologies bactériennes qu’on mettrait sur le compte d’un coronavirus. Les gens ne viennent plus au cabinet, ils ne veulent pas nous déranger. Nous craignons une deuxième vague de coronavirus même si elle sera certainement moins forte, mais surtout une vague de complication de nos patients chroniques.

Aucune protection Nous n’avons pas du tout été fournis en équipement. Dans notre cabinet, nous sommes sept et nous avons une petite boîte de masques chirurgicaux car le pharmacien de la rue nous l’avait mise de côté, mais nous n’avons rien reçu des autorités. La ministre de la Santé dit sur les plateaux télé que les masques chirurgicaux ne sont pas utiles en première ligne, certainement pour justifier la pénurie. En 2019, la ministre a fait détruire un stock de plus de 5 millions de FFP2 qui n’a pas été remplacé. Sans équipement, c’est compliqué de continuer à aller voir nos patients chroniques, nos personnes âgées…

Un réseau hospitalier important Sur l’ensemble du pays, les hôpitaux ne sont pas à saturation, même si sur Bruxelles la situation est plus tendue et qu’il faudra peut-être, comme en France, organiser des transferts de patients. Globalement, la situation a été bien anticipée et les hôpitaux ont été vidés assez vite avant le pic. Une des forces du système de santé belge, c’est que nous avons énormément d’hôpitaux par rapport au nombre d’habitants. Sur Bruxelles par exemple, qui n’est pas très grande par rapport à Paris, nous avons six ou sept hôpitaux de taille universitaire. Au niveau politique, c’est quelque chose que certains voudraient changer pour centraliser davantage sur quelques sites. Mais avec ce genre d’épidémie, nous constatons que c’est une force."

Propos recueillis par Amandine Le Blanc

Source : lequotidiendumedecin.fr