Dr Pierre Hurtebize, 58 ans, président d’Imhotep

« Se dévoiler devant un confrère, une démarche assez inhabituelle »

Publié le 13/05/2011
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Le Généraliste : Imhotep a démarré en décembre 2010, comment le message passe-t-il auprès de vos confrères ?

Les confrères sont persuadés que ça ne peut être que bénéfique. Mais la démarche reste difficile. C’est tout le problème d’instaurer cette nouvelle philosophie où, en fait, on demande à un médecin de devenir patient, ce qui n’est pas forcément agréable. Plein de facteurs entrent en jeu : d’abord la peur qu’on découvre vraiment quelque chose, ou de se retrouver à vie avec une boîte de médicaments pleine de petites pilules à avaler, et aussi la peur de passer pour un imbécile, à savoir que l’on va décrire une plainte qui à l’arrivée est totalement psychosomatique. En définitive, le fait de se dévoiler devant un confrère est une démarche assez inhabituelle.

Combien de praticiens ont, pour l’heure, adhéré à votre initiative ?

Pour l’instant, on tourne avec une cinquantaine d’adhérents et nous avons débuté cette semaine une action de sensibilisation et d’information en direction de 1 200 confrères de l’agglomération de Rouen. On s’aperçoit que comme pour toute chose nouvelle, il faut un temps d’adaptation. Le Dr Kuntz, le spécialiste de médecine préventive qui copilote la structure, a déjà commencé des visites et des consultations. Imhotep a vocation à toucher les médecins libéraux de la région de Haute-Normandie, soit 2 900 médecins, généralistes et spécialistes confondus.

Peut-on parler de médecine du travail pour les libéraux ?

Pas vraiment. Cela va au-delà, puisqu’on propose aux praticiens, en fonction des facteurs de risque dépistés, une orientation vers un réseau de spécialistes qui sont des confrères spécialistes libéraux, choisis avec le médecin patient. Mais on s’arrange pour que ce soit un confrère avec qui il n’a pas l’habitude de travailler. Bref, que ce ne soit pas un copain, pour que la relation médecin-malade entre guillemets ne soit pas faussée.

Combien coûte un tel dispositif ?

Le coût de fonctionnement est de 200 000 euros par an. Pour l’instant nous avons obtenu 95 000 euros de l’ARS pour l’exercice 2010-2011. C’est notre seul financement et nous sommes à la recherche de partenaires. Nous avons d’ores et déjà réitéré une demande auprès de l’ARS pour l’an prochain et nous attendons des réponses au niveau des URPS, des Ordres et nous avons aussi sollicité des partenaires privés : industrie pharmaceutique, un groupe d’assurances. Ce que nous voulons, c’est finir et finaliser notre première année d’ici octobre pour obtenir une évaluation de ce qui a été fait. A partir de là on pourra peut-être envisager une extension du projet sur d’autres territoires géographiques, car la médecine préventive pour les médecins libéraux, pour s’assurer qu’ils sont et qu’ils restent en bonne santé, est aussi une façon de combattre la désertification médicale.


Source : lequotidiendumedecin.fr