Octobre 2007. Quelques mois après son élection, Nicolas Sarkozy souhaite réguler la liberté d’installation des médecins. Vent debout, étudiants et internes battent le pavé (voir photo) et font reculer le nouveau président de la République. Des états généraux sont organisés quelques mois plus tard. En février 2018, un groupe de concertation composé de jeunes médecins émet l’idée de porter le DES de médecine générale de 3 à 4 ans. « Il faut perfectionner la qualité de la formation, faire en sorte qu’elle s’effectue pendant un an en ambulatoire », commente alors Bérengère Crochemore, qui deviendra quelques mois plus tard présidente de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG). En avril, le syndicat se prononce pour un internat en 4 ans avec une 4e année professionnalisante. Il présente un projet de maquette en octobre qui laisse la place à un stage d’un semestre en ambulatoire tous les ans et une dernière année réservée au projet professionnel du futur généraliste. L’Isnar-IMG souhaite ainsi assurer aux jeunes médecins un cursus structurant, diminuer la période de remplacement et « favoriser une dynamique d’installation réactionnelle ». Trop précoce, sans doute, le projet ne voit pas le jour.
De rapport en rapport, une idée qui fait son chemin
L’idée refait surface en novembre 2010, dans un rapport d’Elisabeth Hubert sur la médecine de proximité. Elle suggérait de créer une année de seniorisation après le 3e cycle afin de préparer les futurs généralistes à l’exercice en cabinet libéral. L’ex-ministre de la Santé souhaitait que cette 4e année d’internat s’effectue chez un médecin généraliste tuteur de référence, dans un territoire sous-dense ou en voie de l’être. « À l’instar d’un collaborateur libéral, le jeune médecin senior serait installé dans un cabinet dont il n’aurait pas à assurer l’installation et la gestion. » Elisabeth Hubert souhaitait qu’il bénéficie des revenus des actes effectués avec une rémunération minimale garantie et que ses charges soient portées par les collectivités territoriales (municipalité, communauté de communes, département).
Mettre fin à une « incongruité »
Ces dernières années, le DES à 4 ans est devenu un cheval de bataille des généralistes enseignants. Auteur d’un rapport sur la valorisation de la médecine générale en mars 2015, le Pr Pierre-Louis Druais, alors président du Collège de la spécialité, voyait dans l’allongement de l’internat une « reconnaissance ». « La durée de 3 ans est insuffisante et apparaît comme une incongruité par rapport à des formations de 4 ans pour des DES de spécialités aux champs plus resserrés », écrivait-il. Il réclamait une « 4e année de collaboration tuteurée en lien avec la faculté ». En dépit de leurs demandes réitérées, les généralistes enseignants ne parviennent pas à obtenir l’allongement de l’internat lors de la réforme du 3e cycle entrée en vigueur en 2017. En 2016, le gouvernement a préféré donner raison aux internes en maintenant le DES en 3 ans plutôt que d’ajouter une année supplémentaire.
Lors du congrès de la médecine générale il y a deux ans, le Collège avait lancé une pétition regrettant que les ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur ne proposent pas de « perspective du passage à 4 ans du DES contrairement aux engagements pris ». Il y a un an, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) rendait public un rapport sur la réforme du 3e cycle dans lequel elle recommandait notamment de « réviser » la durée de l’internat en médecine générale « sous réserve que les conditions de faisabilité soient évaluées et réunies ». L’Igas estimait le coût d’une telle réforme à 150 millions d’euros supplémentaires par an.
Le « oui mais » de l’Isnar-IMG
Dans la foulée de ce rapport, l’Isnar-IMG s’est de nouveau déclarée favorable à une année d’internat complémentaire en posant plusieurs préalables : « nombre suffisant de stages ambulatoires et de maîtres de stage des universités » (environ 10 000 aujourd’hui, il en faudrait 12 000, estime le CNGE), ainsi qu’une « hausse des effectifs des enseignants en médecine générale et un véritable investissement pédagogique du parcours de formation... ». Surtout, le syndicat souhaite que ces deux semestres supplémentaires ne soient pas des « remplacements déguisés », principale crainte exprimée dans notre enquête. « Cette 4e année doit être professionnalisante et construite sur le projet personnel de l’interne », rappelait en novembre Lucie Garcin, présidente de l’Isnar-IMG, lors du congrès du CNGE. La ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal a douché les généralistes enseignants en déclarant dans nos colonnes en novembre qu’« une 4e année de DES de médecine générale ne s’impos[ait] pas ». Partisans et adversaires d’un internat de la spécialité en 4 ans pourraient, qui sait, se mettre d’accord derrière une proposition formulée par le Pr Vincent Renard, président du CNGE : raccourcir les deux premiers cycles d’un an pour allonger d’autant l’internat.
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