En Centre-Val de Loire, médecins, pharmaciens, infirmiers et kinés ont exprimé dès 2012 leur volonté de travailler ensemble à de nouveaux projets de territoire. Sous l'impulsion de l'URPS médecins, une Fédération des (dix) Unions régionales a été créée pour réunir les libéraux de santé autour de priorités communes.
Dans cette région frappée par la désertification médicale, la priorité des soignants libéraux a été notamment l'accès des patients aux spécialistes et le renforcement de la coordination interpro. Et pour relever ce défi, les élus ont décidé très tôt d'investir sur les fameuses communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), inscrites dans la loi HPST pour faciliter la coordination des soins ambulatoires.
Maillage homogène
Porté par l'URPS médecins libéraux, un plan de bataille a été imaginé. En se fondant sur les données de l’Assurance-maladie, l'Union a quadrillé chaque territoire en fonction des trajectoires de consommation de soins des patients suivis par les médecins de ville, que ce soit aux urgences ou en consultation hospitalière. Cette fine cartographie a permis de baliser le territoire avant l'émergence des premiers pools de libéraux. « Ce travail en amont a facilité la démarche des porteurs de projet de CPTS sur le territoire. Normalement, une CPTS réclame six ans de travail ! », témoigne le Dr Raphaël Rogez, président de l'URPS ML. Au total, 32 CPTS ont été projetées dès 2016 pour assurer un maillage « homogène » de la région, à raison de 4 à 5 groupements par département.
Le démarrage n'a pas été un chemin de roses. Dans chaque secteur identifié, l'équipe référente de l'URPS devait « aller chercher » des praticiens leaders pour fédérer des équipes autour du projet de communauté. « Nous avons fait des réunions d'information pour leur expliquer ce que le collectif peut leur apporter. Puis nous avons mis en place une forme de compagnonnage », poursuit le Dr Rogez.
Pour décharger ces pionniers des démarches administratives, dont se plaignent volontiers les médecins libéraux, l'URPS a créé de toutes pièces une fonction de « coordinateur » au service de la CPTS. Sa mission ? Dénicher des lieux de réunion, envoyer les invitations, gérer les comptes rendus, etc. Dès le démarrage, l'URPS ML a pu dégager un budget spécifique pour financer ces coordinateurs à plein temps. « Nous avions 300 000 euros au départ pour salarier sept coordinateurs en 2016. Une fois signé le contrat avec l’ARS, la CPTS devient autonome. Si elle souhaite salarier à son tour le coordinateur, elle devra le rémunérer avec les aides financières allouées, de l’ordre de 50 000 euros », indique le neurologue de Tours.
Une aide primordiale sur le plan administratif
Malgré les obstacles (multiplicité des acteurs, méconnaissance du secteur médico-social), le bilan est très satisfaisant. Près des trois quarts de la population régionale est couverte par une équipe pluriprofessionnelle, contre 56 % en juillet dernier. Et sur les 32 CPTS projetées initialement, 19 sont opérationnelles – dont 18 avec un financement pérenne issu de l'accord conventionnel interprofessionnel –, 7 projets sont en cours de rédaction et 6 à l'étude.
Présidente de la CPTS « Asclépios », le Dr Alice Perrain, élue de l'URPS, a bénéficié de cet accompagnement serré. « Au début, nous nous sommes débrouillés seuls, avec peu de moyens. Mais grâce à la fédération des URPS, nous avons reçu le financement d'un coordinateur pour nous aider à rédiger le projet de santé et fédérer les professionnels. C'était une aide primordiale sur le plan administratif et logistique. Le coordinateur maîtrise les rouages pour faire avancer les besoins des professionnels du territoire », témoigne la généraliste à La Croix-en-Touraine.
Grâce à cet auxiliaire précieux, sa CPTS qui couvre une zone de 50 000 habitants avec plus de 250 libéraux de santé a pu contractualiser l'an dernier avec la CNAM. Comme pour d'autres communautés, cette signature ouvre la porte à un financement pérenne.
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