Manuel Valls, candidat à la primaire de la gauche, a lancé mardi un pavé dans la mare lors de la présentation de son projet pour la France. Dans ce document d'une cinquantaine de pages, l'ancien Premier ministre érige l'accès aux soins en priorité et affirme carrément son intention d'« en finir avec les dépassements d'honoraires en secteur II conventionné ».
Il propose une « convergence tarifaire progressive vers un tarif unique et opposable ». Selon Manuel Valls, cette évolution s'impose car « la pratique des dépassements d'honoraires constitue une brèche dans notre système de santé qu'il faut résolument combler ».
Démagogie
Cette proposition radicale n'est évidemment pas du goût de la profession. « Cette mesure est électoraliste, démagogique et complètement inapplicable, tempête le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France (FMF). C'est insupportable, Manuel Valls commence mal sa campagne. » Selon le leader syndical, cette piste est peu crédible au demeurant. « Faut-il croire un candidat qui promet de faire en un an ce qu'il n'a pas fait en tant que Premier ministre pendant près de trois ans ? », conclut le Dr Hamon.
Le Dr Patrick Gasser, président de l'UMESPE, branche spécialiste de la CSMF, estime de son côté que la suppression du secteur II, soupape tarifaire, n'a aucun sens au regard de la valeur actuelle des tarifs des actes médicaux. « Les politiques ne sont pas dans la réalité et cette proposition qui se veut "sociale" ne colle pas à la réalité du terrain et va faire un flop, s'exclame-t-il. Supprimer tous les dépassements signifierait que l'on augmenterait tous les tarifs opposables ! »
La CSMF affirme également que le remède proposé serait pire que le mal. « On ne soigne pas la fièvre en cassant le thermomètre, déclare son président le Dr Jean-Paul Ortiz. Comment enrayer le désengagement de la Sécurité sociale, voilà la question qu'il faut se poser ! »
La situation est d'autant plus problématique que les tarifs médicaux français font partie des plus bas d'Europe, souligne le Dr Philippe Vermesch, patron du SML, syndicat qui regroupe de nombreux praticiens de secteur II. « La gauche a un dogme qui est la santé en tiers payant pour tout le monde et à moindre prix, avance-t-il. L'hôpital est favorisé et ils ne veulent pas de la médecine libérale. »
Estimant que le secteur II a été victime d'une « discrimination » dans la dernière convention (de nombreux avantages et avancées tarifaires n'ont pas concerné ce secteur), le leader syndical prend au sérieux la menace de Manuel Valls. « Si la gauche repasse, la médecine libérale sera étatisée dans quelques années », pronostique-t-il.
Supprimer le numerus clausus
Dans son programme santé, Manuel Valls souhaite par ailleurs « rembourser à 100 % un ensemble de soins de ville » – dont il ne précise pas le périmètre.
Il entend également intensifier la lutte contre les déserts médicaux grâce à un « grand plan de la médecine de proximité avec les soignants, les patients ». Mais il n'indique ni le calendrier ni la forme que prendrait cet échange.
L'ancien chef du gouvernement a l'intention de former davantage de médecins en supprimant le numerus clausus. L'ancien locataire de Matignon veut également faire évoluer les modes de rémunération en ville et à l'hôpital, mais là aussi, le candidat ne précise pas ses intentions.
Face au malaise des personnels hospitaliers, il annonce son ambition de faire de la qualité de vie « un des chantiers prioritaires à l'hôpital pendant le prochain quinquennat ».
Article précédent
Primaire à gauche : le comparatif des programmes
Article suivant
Vincent Peillon (PS) : « La Sécurité sociale doit continuer de prendre en charge tous les risques »
Hamon et Valls, deux candidats qui bousculent les médecins libéraux
Primaire à gauche : Peillon veut inciter les médecins remplaçants à exercer dans les déserts
Aide pour le conjoint, prêt à taux zéro, conventionnement sélectif : les recettes de Benoît Hamon contre la désertification
Manuel Valls : « Nous n'avons plus d'autre choix que de limiter la liberté d'installation »
Les ordonnances du SML pour « soigner » les maux de Valls et Hamon
Benoît Hamon président, ce qui changerait pour les médecins et la santé
Santé, protection sociale : ce qu'ils mijotent
Montebourg veut créer une mutuelle à 10 euros par mois
Primaire à gauche : pleins feux sur la santé, la protection sociale et les mutuelles !
Primaire à gauche : le comparatif des programmes
Valls veut supprimer le secteur II, tollé chez les syndicats de spécialistes
Vincent Peillon (PS) : « La Sécurité sociale doit continuer de prendre en charge tous les risques »
Primaire à gauche : les candidats aux petits soins de la Sécu, « pilier de la République »
En campagne à Villeneuve-Saint-Georges, Peillon veut « donner de l'oxygène » à l'hôpital public
Missions, consultation et diagnostic, prescription : le projet Valletoux sur la profession infirmière inquiète (déjà) les médecins
Désert médical : une commune de l’Orne passe une annonce sur Leboncoin pour trouver un généraliste
Pratique libérale : la chirurgie en cabinet, sillon à creuser
Le déconventionnement tombe à l’eau ? Les médecins corses se tournent vers les députés pour se faire entendre