«La France n’a jamais compté autant de médecins. » Tel est le constat de l’Atlas 2015 de la démographie médicale, dévoilé mardi par l’Ordre des médecins. Avec 281 087 médecins inscrits au tableau, dont 215 539
en activité, on compte en moyenne 281,4 médecins pour 100 000 habitants en métropole. Un résultat qui cache des grandes disparités, non seulement territoriales mais également entre les spécialités.
Alors que les effectifs des spécialités médicales et chirurgicales augmentent constamment depuis 2007, ceux des généralistes ont diminué de 10,3 % sur la même période. Une baisse qui devrait se poursuivre jusqu’en 2020. D’environ 65 000 il y a 8 ans, les généralistes libéraux sont passés à 58 104 cette année. Et ils pourraient n’être qu’à peine plus de 54 000 dans 5 ans, soit 6,8 % de moins qu’aujourd’hui. L’Ile-de-France enregistre la plus importante diminution d’effectifs, avec -17,1 % de généralistes. Avec -3,6 %, la Franche-Comté et l’Alsace affichent les moins fortes baisses.
Dans leur ensemble, les médecins restent attirés par le pourtour méditerranéen du côté du Languedoc-Roussillon et « l’Arc atlantique », souligne le Dr Jean-François Rault, membre du CNOM et responsable de cet Atlas. Les régions de la façade océanique, de la Basse-Normandie à l’Aquitaine ont vu leurs effectifs augmenter depuis2007, la palme revenant aux Pays de la Loire avec +6 % de professionnels. Sur la même période, quatre régions ont stabilisé leur nombre de médecins et huit l’ont vu décroître, la plus forte baisse étant observée en Ile-de-France (-6 %). Celle-ci reste malgré tout la 2e région en terme de densité médicale, PACA occupant la première place avec 352 médecins pour 100 000 habitants quand la Picardie, dernière du classement, n’en compte que 231.
Féminisation et vieillissement sont les deux dénominateurs communs aux différentes spécialités et lieux d’exercice. Âgés en moyenne de 59 ans, les hommes représentent encore 59 % de la profession. Les femmes sont en moyenne plus jeunes de 6 ans que leurs confrères. Dès lors qu’on s’intéresse aux 7 525 nouveaux inscrits, la proportion d’hommes et de femmes s’inverse, celles-ci représentant 58 % des « entrants ». Et de l’avis général, contrairement aux idées reçues, ce n’est pas la féminisation de la profession qui explique la diminution du temps de travail mais les aspirations des nouvelles générations, les jeunes médecins souhaitant trouver un équilibre entre leur profession et leur vie personnelle.
La « fuite » des étudiants français
À l’autre bout du tableau, les médecins de plus de 60 ans représentent 26,4 % de l’effectif total, dont environ 14 500 praticiens retraités. Outre le déplafonnement du cumul emploi retraite, « ces médecins continuent car ils sont attachés à leur exercice et peuvent avoir des difficultés à trouver un successeur », explique Jean-François Rault. Des praticiens qui, ajoute-il, ne suffiront pas à combler le déficit de professionnels, tout comme les médecins diplômés à l’étranger, soit un quart des nouveaux inscrits à l’Ordre, qui préfèrent le salariat et s’installent dans des zones bien dotées. De la même façon, l’Atlas a mis en évidence « une fuite » d’étudiants français, 25 % d’entre eux se dirigeant vers une voie différente de celle du soin une fois leur diplôme obtenu.
À l’heure où la problématique des déserts médicaux s’impose dans le débat public – c’est la 2e préoccupation des Français en matière de santé selon un sondage Espace Social Européen paru au début du mois –, ces chiffres ne laissent pas franchement entrevoir d’amélioration… Mais ne justifient pas pour autant de changer de cap. « Il faut se poser et réfléchir avant de bouger un chiffre », recommande le Dr Patrick Romestaing, membre de l’Ordre, le numerus clausus en tête. Très bas dans les années 1990, celui-ci a été porté à plus de 7 000 depuis 7 ans.
Compte tenu de la dizaine d’années de formation, « nous sommes au milieu du guet, on n’a pas encore vu les effets de l’augmentation, il faut donc attendre avant de changer le numéro », affirme-t-il, s’interrogeant par ailleurs sur la capacité de l’université à former plus de médecins. Et de questionner l’intérêt même d’une telle sélection, certains jeunes ayant échoué lors de leur première année décidant d’aller se former ailleurs, signe, selon lui, d’une réelle motivation.
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