La gestation pour autrui (GPA) est « éthiquement défendable », à condition de respecter des principes et conditions précises, estime le Comité consultatif de bioéthique de Belgique. Dans un rapport publié le 5 juin, les auteurs expliquent que la GPA devrait être encadrée légalement, afin de garantir la sécurité juridique des parties prenantes et un accès équitable à la pratique. Le comité répondait à une demande du ministre de la Santé publique de 2021 d'actualiser son précédent avis de 2004.
À la différence de la France où la GPA est interdite - « ligne rouge » infranchissable réaffirmée dans la loi de bioéthique de 2021 -, cette pratique ne bénéficie d'aucun encadrement légal en Belgique. Elle est donc réalisée, de façon marginale, dans cinq hôpitaux, à Bruxelles, Gand et Anvers. Il y aurait eu 33 cas officiels de GPA dans le pays en 2019. Les demandes viennent en majorité de couples hétérosexuels, dont la femme est atteinte d'une stérilité irréversible ; seulement deux hôpitaux acceptent les couples homosexuels.
En l'absence de cadre national, chaque centre a son protocole. Tous ont en commun d'exiger un lien génétique avec au moins l'un des parents d'intention (et de refuser un double don), et d'interdire les arrangements de type commercial. Seule une compensation des frais liés à la GPA pour la femme gestatrice est permise.
Altruisme, autonomie, solidarité, accès équitable
Pour fonder son avis, le comité avance plusieurs arguments. D'abord, la GPA serait légitime au nom de la solidarité reproductive : « la GPA est une question de solidarité collective et interindividuelle à l’égard de personnes qui ne peuvent pas procréer sans l’aide d’une tierce personne », lit-on. Elle repose sur l'altruisme et doit être réalisée sans but lucratif, ce qui exclut tout accord commercial.
La GPA se justifie en outre par le respect de l'autonomie : celle des parents d'intention et celle de la femme gestatrice (qui a le droit de disposer de son corps, et de prendre une décision libre et éclairée d'utiliser son propre corps pour rendre service à une autre personne).
L'autonomie des deux parties, les parents et la femme, peut néanmoins entrer en tension, voire en conflit. D'où la nécessité d'un accord préalable, estime le Comité, sur des points sensibles comme le suivi de grossesse, les modalités de transfert de l'enfant, le statut juridique des parents d'intention, la place et le rôle de la femme gestatrice après la naissance. Aux centres d'encadrer ces discussions, d'informer les acteurs sur les risques, et aussi de s'assurer que la parturiente ne subit aucune pression morale ou financière. L'encadrement légal de la GPA doit notamment permettre de s'assurer que son accord est éclairé, libre et volontaire.
« L'équipe médicale a le droit au respect de son autonomie professionnelle, notamment pour décider si une demande de gestation pour autrui est acceptable ou non sur la base de critères psychomédicaux », lit-on encore. Est en particulier précisé que la GPA doit être limitée « aux parents d’intention qui n'ont pas d’autre option médicale en termes d’assistance à la procréation ou qui sont confrontés à des risques majeurs liés à la grossesse ».
Parentalité fondée sur l'intention
Le Comité met aussi en avant les résultats « rassurants » et « positifs » des (rares) études psychosociales existantes, quant au bien-être des enfants et des mères gestatrices.
Il défend en outre l'existence d'une parentalité fondée sur l'intention. « La parentalité ne doit pas nécessairement reposer sur un lien biologique/génétique. Dans la lignée du don de gamètes, de l'adoption et des familles recomposées, le sens des relations parentales doit résider avant tout dans l'intention et le désir d'être parent, et non dans la capacité biologique à concevoir un enfant », écrit-il. Le comité récuse le modèle de l'adoption pour assurer la filiation, jugé trop lourd et visant d'autres finalités.
Enfin, la légalisation de la GPA permettrait d'en assurer un accès équitable sur tout le territoire : « le comité défend le principe de non-discrimination basée notamment sur le sexe, l’orientation sexuelle, la situation sociale et familiale et la capacité financière », lit-on.
Deux points de dissensus
Le comité se divise en revanche sur deux points, à commencer par savoir jusqu'à quel point la femme gestatrice peut renoncer à se séparer de l'enfant après l'accouchement, certains jugeant impossible de l'y forcer, d'autres estimant qu'il est primordial de respecter l'accord initial, au nom de la sécurité juridique.
Quant au second désaccord, il porte sur le cas d'une GPA où la femme gestatrice serait aussi la « donneuse » d'ovocytes. D'aucuns estiment que de telles grossesses devraient être évitées, afin de « minimiser le lien émotionnel entre la femme gestatrice et l'enfant, et le risque de conflit ».
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