« Demain nous investirons davantage pour prévenir que pour guérir ». Deux semaines après sa nomination au ministère de la Santé, Agnès Buzyn a hissé la prévention au rang de priorité absolue de son action. « Vous êtes les premiers à qui je m’adresse publiquement depuis ma nomination et ce n’est pas par hasard », a ainsi déclaré mardi la nouvelle ministre, visiblement émue, lors de l’ouverture, à Paris, des Rencontres de Santé Publique France.
La néolocataire de l’avenue de Ségur était venue « faire part de sa détermination en faveur de la santé publique ». Elle a insisté sur la nécessité de la participation des autres politiques publiques à la prévention et "surtout à la promotion de la santé" afin de « gagner en efficacité ». C’est d'ailleurs dans ce sens que l’ex-directrice de la HAS a récemment rencontré Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire, et Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, avec lesquels elle dit s'être longuement entretenue sur les questions de l’éducation à la santé et de prévention.
Sur la prévention, la nouvelle ministre se montre décidément en phase avec les priorités de campagne du nouveau président qui doit d'ailleurs la recevoir vendredi. "La politique de prévention doit être marquée par un véritable investissement, significatif et de long terme", affirme la ministre, jugeant les 15 milliards d’euros alloués à la prévention (5,9 % des dépenses de santé) insuffisants : "Ceci est moins que nos voisins européens et la plupart des pays de l’OCDE".
Agnès Buzyn a également insisté sur le besoin de mieux former à la prévention et plaidé en faveur de la recherche en prévention, "les facteurs de risques comportementaux et environnementaux sont nombreux et nous devons améliorer notre corpus de connaissances sur le sujet".
Les médecins de premier recours au cœur de la prévention
Si tous les acteurs de la santé « ont leur place pour réaliser ce virage vers la prévention », la successeure de Marisol Touraine compte en particulier sur les médecins de premier recours, dont le rôle est « essentiel » dans la sensibilisation des patients et qui doivent « être reconnus et valorisés à ce titre ».
Et la néoministre de poursuivre : "Il nous faut également intégrer la question de la réduction des risques et des inégalités sociales de santé dans toutes les actions de prévention. Dans cette optique, Agnès Buzyn compte sur le stage sanitaire de trois mois pour tous les étudiants en santé (dont 40 000 dans des écoles ou des entreprises). "Il apparaît nécessaire de développer, encourager et promouvoir un réseau national de santé publique capable de relayer les interventions efficaces et prouvées scientifiquement. Mais je le répète, ce réseau ne suffira pas seul, sans l’implication des professionnels de premier recours qui doivent être au cœur de cette démarche" ajoute-t-elle. Une implication qui ne fut pas suffisante à son goût lors du "Mois sans tabac", où seulement 700 documents ont été commandés par des médecins.
Lutter contre le tabagisme, y compris celui des soignants
"Si j’ai choisi d’être parmi vous aujourd'hui, c’est aussi car nous sommes à la veille de la journée mondiale sans tabac". Dans la lignée de ses actions à la tête de l'Inca et de la HAS, la ministre s'est longuement attardée sur le tabagisme, considérant sa prévalence (34,5 % chez les 15-75 ans) "bien trop élevée au regard de celle des autres pays". Là encore, elle compte sur les acteurs de santé pour relever ce défi : "Les médecins de premiers recours sont un élément essentiel des politiques de prévention, nous devons leur faire connaître l’ensemble des dispositifs à leur disposition pour les soutenir dans leur proposition d’aide au sevrage tabagique. Et les encourager à aider leur patientèle à participer au 'mois sans tabac'".
Autre solution d'Agnès Buzyn pour que la France ne soit plus un mauvais élève : régler le problème du tabagisme des professionnels de santé "par souci d’exemplarité et d’efficacité". S'il a connu un net infléchissement chez les généralistes entre 2003 et 2015, la prévalence passant de 29 à 16 %, les chiffres sont alarmants chez les infirmières et les aides soignantes avec respectivement 31 et 44 %. Bien loin des 5 % de professionnels américains et anglais.
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