Dernière ligne droite pour les élections européennes : le scrutin (un seul tour) aura lieu ce dimanche 9 juin. Dans les débats télévisés organisés ces dernières semaines, il a été très peu question de santé, contrairement à d’autres thématiques comme la défense, l’immigration ou l’environnement. Pourtant, en parcourant les programmes des principales listes, des propositions sont avancées, en ordre dispersé, et de façon variable.
Au RN, peu d’intérêt pour le sujet
Tandis qu’il fait – très largement – la course en tête des sondages pour ces élections (plus de 30 % des intentions de vote), le Rassemblement national (RN), parti de Marine Le Pen, n’a écrit que quelques lignes au sujet de la santé dans son programme. Sous la forme de deux propositions : « renforcer les échanges scientifiques », comme sur la lutte contre le cancer, et « sécuriser les capacités de production de médicaments à l’échelle européenne ». Cette dernière piste est d’ailleurs portée par toutes les autres listes en raison des pénuries observées dans les pharmacies hexagonales.
La majorité présidentielle mise sur la recherche
De son côté, Valérie Hayer (Renaissance), tête de liste de la majorité présidentielle, a un peu parlé du sujet. Son programme met en avant la priorité de « relocaliser notre production des médicaments », en adoptant une loi européenne ad hoc. L’idée, peut-on lire, est également de procéder à des achats communs et groupés de produits stratégiques, notamment pour en réduire les prix. Ce qui permettrait à terme de « prévenir et gérer toute future pandémie ou pénurie ». En parcourant les livrets thématiques de la liste dirigée par Valérie Hayer, on trouve aussi le « plan Europe 2030 », qui entend relancer la recherche en santé, avec « un plan Marie Curie massif pour des vaccins et traitements européens contre le cancer, la recherche sur l'autisme et les maladies dégénératives, dont la maladie d’Alzheimer ». Outre la généralisation des politiques les plus protectrices pour les femmes, la liste Hayer porte l’inscription de l’IVG dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Aussi, elle souhaite « interdire les thérapies de conversion », dont sont victimes 2 à 5 % des personnes LGBT en Europe.
Bouclier rural au PS
Du côté de la liste commune du Parti socialiste et de Place publique, quelques mesures santé font certes partie du programme mais elle restent assez générales. Figure ainsi la volonté de « garantir l’accès à la santé par l’investissement dans les hôpitaux et les équipements de proximité », « assurer un accès universel à la santé mentale, sexuelle et reproductive » ou encore « améliorer la couverture de la Sécurité sociale ». Plus originale, la création d’un « bouclier rural » pour permettre de financer « des projets d’installation ou de maintien des services publics, notamment pour l’accès à la santé ». Pour les territoires en difficulté, les socialistes promettent de financer « 100 % des projets qui touchent aux services publics de base », dont – une nouvelle fois – « l’installation de professionnels de santé en ruralité ». La liste de Raphaël Glucksmann porte elle aussi l’idée d’un « service public européen du médicament » afin d’« assurer notre souveraineté sanitaire » en constituant des stocks stratégiques et en soutenant leur production.
Chez LR, un réseau d’hôpitaux européens dans un cadre transfrontalier
Chez Les Républicains (LR), la santé est un sujet important. Sur le plan macro, le programme fait état du doublement du budget de l’UE consacré à la recherche et à l’innovation pour la période 2024-2027 pour se fixer l’objectif de 4 % du PIB d’ici 2030. L’investissement dans des programmes de santé publique vise à « trouver des traitements efficaces pour le cancer, les maladies liées au vieillissement, le diabète, l’endométriose et les maladies mentales ». Mesure plus surprenante : la liste portée par François-Xavier Bellamy propose de « développer un réseau d’hôpitaux européens de haut niveau dans un cadre transfrontalier », en s’appuyant sur le modèle de l’hôpital de Cerdagne, ouvert en 2014, qui « soulage des milliers de Français des Pyrénées-Orientales qui devaient jusque-là rouler jusqu’à 100 km pour se faire soigner ». Ainsi, sont envisagés des pôles transfrontaliers de médecine hospitalière entre Hauts-de-France et Belgique ; Grand Est et Luxembourg et Allemagne ; Auvergne Rhône-Alpes et Italie ; Occitanie et Nouvelle-Aquitaine et Espagne.
Comme les autres listes, celle de LR, par la voix du Pr Laurent Castillo, médecin ORL niçois 5e sur la liste, entend constituer des stocks stratégiques européens de « produits pharmaceutiques, d’équipements médicaux et de vaccins », en déployant une politique de relocalisation par un fonds européen et en simplifiant les procédures de mise sur le marché des médicaments « pour permettre un accès plus rapide aux soins »,.
LFI s’attaque aux fonds de pension et assurances privées
Du côté de la France Insoumise (LFI), la liste menée par la députée européenne sortante Manon Aubry s’appuie sur un programme santé conséquent. Défense du modèle de Sécurité sociale, refus du recours aux assurances privées, reconnaissance et prévention du burn-out, droit à la déconnexion, droit d’arrêt de travail en cas de chaleur extrême sans perte de salaire, campagnes de prévention sur la santé mentale, droits LGBT… Des mesures structurelles sont avancées comme le fait de « refuser la libéralisation des laboratoires de biologie médicale et leur rachat par des fonds de pension », « organiser le déploiement de plateformes d’hébergement de données de santé publiques sécurisées dans chaque pays membre » ou fonder les politiques publiques à partir du principe One Health (Une seule santé). La liste LFI ambitionne aussi de renforcer les coopérations européennes en santé, notamment en termes de prévention et de gestion des pandémies.
La santé publique et environnementale n’est pas oubliée, notamment pour améliorer la qualité de l’air, éradiquer l’amiante ou interdire les perturbateurs endocriniens. La liste est par ailleurs favorable au fait d’inscrire le droit à mourir dans la dignité dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE ; et elle compte défendre la généralisation du droit à la fin de vie assistée.
Pour les écolos, une CMU européenne
De son côté, le parti écologiste, dont la liste est dirigée par Marie Toussaint, compte faire de la santé « la nouvelle boussole des politiques publiques ». Et son programme est fourni : la liste propose un « droit à une CMU européenne », un plan pour la santé mentale et un investissement dans les établissements de proximité. Autre idée, la création d’« un service public européen du médicament pour produire en Europe les médicaments génériques et essentiels ».
La liste veut faire de la santé des femmes une priorité, notamment en mettant en place des « maisons européennes de proximité » dédiées aux femmes. Elle réclame aussi une « transparence sur la composition de l’ensemble des produits intimes », ainsi qu’un « arrêt menstruel européen en cas de règles incapacitantes ». Un statut européen des aidants, notamment familiaux, est demandé, peut-on lire aussi.
Pas de doute, l’élection européenne ne se jouera pas sur les programmes santé. Pour autant, les électeurs français la placent sur le podium de leurs priorités et les professionnels libéraux tentent aussi de peser dans les débats. Si la relocalisation des médicaments fait consensus, on retrouve ainsi des clivages plus classiques sur la place de l’État et du secteur privé dans la santé. Et certaines listes – comme on le voit – s’illustrent par des propositions plus précises et plus travaillées.
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