Dans une tribune publiée dans le Figaro, 71 médecins dont 28 généralistes se disent opposés à la proposition de loi du député Olivier Falorni (groupe Libertés et territoires) ouvrant un droit à « une fin de vie libre et choisie » pour les personnes souffrant d’une pathologie incurable. Les signataires de cette tribune jugent cette pratique « contraire à la déontologie médicale ». La proposition de loi sera débattue ce jeudi à l’Assemblée en première lecture.
« La peur de la mort constitue l’un des piliers ontologiques de la condition humaine, mortelle […] Le pire ennemi du bonheur, ce n’est pas le malheur, c’est la peur. La peur de la mort qui crée la peur de vivre. La peur de souffrir qui engendre une souffrance plus grande encore », écrivent les signataires de la tribune.
Faisant référence à la proposition de loi du député Olivier Falorni, adoptée il y a une semaine en commission des affaires sociales, les praticiens s’insurgent : « Certains pensent conjurer cette peur par la légalisation d’une mort « librement choisie, médicalement assistée », d’une mort en fait provoquée, en d’autres termes une euthanasie, ou un suicide assisté. »
Ils poursuivent : « Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur du monde affirmait Camus. […] Vous promoteurs d’une telle loi, ayez au moins le courage, la franchise d’appeler les choses par leur nom. »
Au nom du serment d’Hippocrate, ils disent non à l’euthanasie
Dans la tribune, les 71 médecins issus des soins palliatifs et de la médecine générale notamment, s’opposent à une nouvelle loi qui légaliserait l’euthanasie : « Nous, médecins attachés à la sagesse déontologique et morale hippocratique, disons NON. NON, nous ne voulons pas abjurer notre serment professionnel. […] Provoquer la mort ne sera, pour nous, jamais un acte médicalement justifié. Soulager, oui. Tuer, non », écrivent-ils.
Reprenant les termes d’Hippocrate inscrit dans le code déontologie médicale (rédigé au IVe siècle av. J-C), les médecins indiquent « Saluons Hippocrate d’avoir assigné les médecins à cet interdit fondateur : « Tu ne tueras point. » ajoutant les termes d’un article du Code de déontologie médicale (Article R.41127-38) qui stipule : « Le médecin doit accompagner le mourant jusqu’à ses derniers instants, assurer par des soins et des mesures appropriés […] sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage. Il n’a pas le droit de provoquer délibérément la mort. »
Un passage d’ailleurs modifié en 2012 par le Conseil national de l’Ordre des médecins qui avait inscrit : « Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. »
3 000 amendements à l'Assemblée
La proposition de loi qui sera débattue demain en première lecture à l’Assemblée nationale pourra difficilement être adoptée par les députés, au vu du nombre d’amendements déposés, près de 3 000. Preuve que, cinq ans après l’adoption de la loi Claeys-Leonetti, le sujet divise toujours au sein même des partis.
Dans une tribune transpartisane publiée dans le Journal du dimanche, 270 députés favorables à la proposition de loi d’Olivier Falorni ont dénoncé un blocage parlementaire : « Une poignée de députés ont déposé jusqu’à 400 amendements […] Nous voulons débattre. Nous voulons voter. Respectons-le. »
Jean Leonetti, coauteur de la loi actuelle sur la fin de vie, a de son côté critiqué la proposition soumise au Parlement. « La loi proposée est une loi qui donne délibérément la mort : on est dans une dépénalisation de ce que juridiquement, on appelle un homicide. On n’est pas dans une petite avancée, on est dans une rupture », a-t-il déclaré à l’AFP. Pour lui, une telle loi nécessite de passer par des États Généraux. « Ça me paraît précipité de faire un texte sur un sujet dont personne ne considère qu’il est négligeable, sans au préalable un véritable débat avec l’ensemble de la population, et pas un sondage ».
Alain Cocq, atteint d’une maladie incurable depuis 35 ans et militant de longue date pour une "fin de vie digne" a lui aussi appelé les députés à adopter cette proposition de loi, sans laquelle il se verrait « obligé » d’aller en Suisse pour avoir recours au suicide assisté.
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