Les modalités de prescriptions des arrêts de travail vont évoluer. Les deux Cerfa existants – accident de travail et arrêt de travail – seront fusionnés et remplacés par un Cerfa et un téléservice unique.
Ainsi, l’avis d’arrêt de travail devient le support unique pour toutes les prescriptions d’arrêt (maladie, affection longue durée, accident du travail et maladie professionnelle (AT/MP), maternité, décès d'un enfant ou d'une personne à charge), explique l’Assurance maladie. À partir du 7 mai 2022, la déclaration se fera directement sur l’avis d’arrêt de travail et non plus sur un certificat médical spécifique aux AT/MP. « Le certificat médical AT/MP est dédié à la description des éléments médicaux en rapport avec l’accident du travail ou la maladie professionnelle (siège et nature des lésions…). Il est désormais réservé aux demandes d’imputabilité des lésions », détaille la Cnam.
En cas d’accident du travail/maladie professionnelle nécessitant un arrêt, il faudra faire une déclaration d’accident et un avis d’arrêt de travail. Dans le tutoriel (de 21 pages !) mis en ligne à l’attention des médecins, l’Assurance maladie explique que le praticien a la possibilité de commencer par l’un ou par l’autre. « À l’issue de la télétransmission du certificat médical AT/MP, à partir de la page d’accusé de transmission du certificat médical, il sera possible de cliquer sur le bouton « créer un avis d’arrêt de travail » tout en conservant les données du patient déjà saisies. (…) Le téléservice « Avis d’arrêt de travail » permettra de prescrire directement tous les avis d’arrêt de travail (y compris en rapport avec un AT/MP ou en cas de décès d’un enfant ou d’une personne à charge) », précise l’Assurance maladie.
« Inadapté́, incomplet et incompréhensible »
À partir du 7 mai, donc, les nouveaux téléservices seront accessibles mais pour les médecins amenés à utiliser les formulaires papier, « les nouveaux imprimés devront impérativement être utilisés », précise l’Assurance maladie, ajoutant qu’il « convient d’anticiper les commandes de formulaire » ou de les télécharger. Pour l’Assurance maladie, cette réforme présente plusieurs avantages pour les médecins, parmi lesquels : « une démarche unique pour la prolongation d’arrêt, quel que soit le risque, et une diminution du nombre de certificats à établir, notamment avec la disparition du certificat médical pour soins ».
Mais les médecins ne le voient pas forcément du même œil. Sur la méthode, déjà, les syndicats dénoncent le manque de concertation. Ces nouvelles modalités n’ont pas été débattues en comité technique paritaire permanent national, comme le prévoit normalement la convention. Sur le fond, ensuite. La Fédération des médecins de France (FMF) juge dans un communiqué que « tant le nouveau Cerfa arrêt de travail que le téléservice associé sont totalement inadaptés à l'exercice médical, incomplets, et incompréhensibles ».
Par exemple, la FMF souligne qu’en cas de prolongation d’un accident de travail qui ne nécessite pas de prolongation de l’arrêt de travail, rien n’est prévu. « C’est tous les jours que nous avons des patients victimes d'accidents du travail qui reprennent le travail mais ne sont pas guéris pour autant et ont toujours besoin de soins, explique le Dr Richard Talbot. Mais le service arrêt de travail ne permet que d’arrêter le patient (éventuellement en activité allégée ou en temps partiel thérapeutique) et le service AT nouvelle formule permet bien une prolongation, mais uniquement en cas de nouvelle lésion et forcément accompagnée d’un arrêt de travail ».
Encore plus chronophage
De son côté, MG France pointe aussi que le statut professionnel du patient devra être rempli par le médecin ou que le volet 1 de l’arrêt, sur lequel figure le motif médical, sera transmis à l’employeur en ligne. « Si ce dernier est l’État ou un CHU ? Ce serait une violation du secret professionnel dans les administrations qui gèrent elles-mêmes tout le dossier », souligne le syndicat. Sous couvert de simplification, les syndicats dénoncent des déclarations plus complexes. MG France pointe ainsi des formulaires en huit étapes, des situations d’arrêts possibles qui se multiplient avec huit cases à cocher ou des documents différents pour l’arrêt et le certificat médical initial. « Est-ce vraiment plus simple ? », interroge MG France. « Dans sa marche forcée vers la numérisation de la santé, la Cnam oublie le paritarisme, qui aurait permis à la profession de pointer les éléments trop chronophages ou trop risqués au plan médico-légal de ces dispositions », indique le syndicat.
De nouvelles possibilités intéressantes
Malgré ces points de crispation, tout n'est pas forcément à jeter dans cette évolution. Le Dr Richard Talbot souligne notamment quelques nouveautés positives. Les médecins auront ainsi désormais la possibilité d'arrêter quelqu'un pour la perte de « quelqu'un dont il a la charge », un enfant par exemple. « Nous ne pouvions pas le faire auparavant il fallait "tricher" sur le motif. Même si pour l'instant il n'a pas d'indication sur combien de temps nous pouvons arrêter ces patients », ajoute-t-il.
Autre nouveauté, la possibilité d'autoriser certaines activités. Une personne arrêtée n'est plus forcément « inapte à tout ». « Cela peut être intéressant pour les apprentis par exemple. Avant s'il se blessait, il ne pouvait pas non plus aller suivre ses cours au CFA, désormais ce sera possible », analyse le Dr Talbot.
Un moratoire ou le boycott
Mais ces évolutions ne suffisent pas à compenser les défauts d'un nouveau système pensé sans les médecins et à leurs yeux inadapté à leur exercice. La FMF comme MG France demandent donc un moratoire sur ces nouvelles modalités et appellent les médecins au boycott en l’état. De son côté, l'Assurance maladie a répondu aux syndicats sur les réseaux sociaux. Elle affirme que cette évolution est bel est bien une simplification, qu'elle a été expliquée aux représentants des médecins et que les professionnels seront accompagnés.
Dans le cadre du déploiement de ce nouveau dispositif, les professionnels de santé ont été informés et seront accompagnés par les conseillers informatique services de l'Assurance Maladie. Cette évolution a été expliquée aux représentants de la profession ces derniers mois.
— Assurance Maladie (@Assur_Maladie) April 20, 2022
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