La crise du médicament, quelle crise ? En tout cas, le marché du médicament à l'hôpital a connu une forte croissance en 2022 avec une progression du chiffre d'affaires de 13,3 %, selon les chiffres présentés par Iqvia. À comparer avec l'augmentation de 4,6 % observée dans les officines, nourrie surtout par la forte croissance des volumes. Les nouveaux produits en ville ont été peu nombreux en 2022. Dans le secteur hospitalier, la liste en sus affiche une belle santé (+ 23,9 %). La progression est moins forte pour les médicaments dispensés au sein des groupes homogènes de séjour (+13,7 %). Année après année, le marché du médicament à l'hôpital grignote des parts de marché (43,7 %). « C'est une tendance lourde », commente Stéphane Sclison, directeur associé, expert du marché du médicament d’Iqvia France. D'autant que même des médicaments comme les inhibiteurs de la pompe à protons ou les anti-histaminiques sont prescrits dans les consultations externes des hôpitaux, reflet de la difficulté à obtenir des rendez-vous en ville.
Obésité, marché prometteur
Au-delà de 2022, cette croissance devrait se maintenir dans les prochaines années avec un taux compris de 3 % à 6 %. La France se situe dans la fourchette haute avec une estimation comprise entre 5 % à 6 %. À l'horizon 2026, l'oncologie demeure la locomotive du marché avec une croissance estimée de 13 % à 16 %. Mais grâce à de nouveaux traitements, l'obésité émerge comme un marché prometteur. Et se distingue des autres pathologies par une croissance comprise entre 10 % et 13 %. D'autres spécialités n'ont pas connu en effet au cours des dernières années d'innovations majeures comme en cardiologie ou en rhumatologie dans l'arthrose par exemple.
Contraintes budgétaires
L'exercice prospectif demeure toutefois fragile. Car l'industrie pharma est confrontée à de nombreuses incertitudes, dont « le durcissement inévitable des contraintes budgétaires ». Même le premier marché mondial, à savoir les États-Unis dans le cadre de l'Inflation Reduction Act (IRA) a adopté des mesures qui exerceront des contraintes sur les prix des médicaments dispensés dans le cadre du Medicare. Toujours cité comme le pays modèle en Europe, l'Allemagne oblige les laboratoires à un gel des prix jusqu'en 2026. La période de prix libre est réduite à six mois. Dans le même temps, les remises obligatoires passent de 7 % à 12 %. Quant au Japon, des règles très strictes ont été promulguées dès 2022. Résultat, la croissance ne devrait pas dépasser 1 %.
Lancement de produits décevants
Outre ce contexte économique difficile, les lancements 2021-2022 n'ont pas été à la hauteur des espérances, si l'on compare les chiffres d'affaires générés par ces nouveaux produits avec ceux d'avant la pandémie. L'une des explications serait la difficulté à rencontrer les professionnels de santé au cœur de la crise des systèmes de santé. Le phénomène de sous-effectifs, lié aux départs de nombreux professionnels, exerce une lourde pression sur les personnels encore présents. Enfin, après avoir bénéficié d'investissements sans limites ou presque, les « biotechs sont de retour sur terre », note Stéphane Sclison. Les financements reviennent au niveau prépandémique. La crise se traduit par une augmentation du nombre des licenciements.
Hémophilie et drépanocytose ont le vent en poupe
Ces perspectives sombres n'effacent pas la mise sur le marché de thérapies nouvelles qui deviennent commercialement viables. La thérapie génique dans l'hémophilie (Voir Décision & Stratégie Santé 334) ou la drépanocytose confirment leur efficacité. De nouveaux vaccins contre le virus respiratoire syncytial sont attendus dans les prochains mois. Bref, si le monde de la santé a été bouleversé par la pandémie, l'innovation devrait contribuer à nourrir la croissance du marché pharmaceutique dans les prochaines années.
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