Expérimenté depuis 2004, le dispositif Asalée gagne petit à petit du terrain et profite aujourd’hui d’un financement pérenne de l'Assurance maladie. Selon une étude réalisée en 2018 par l’IRDES (Institut de recherche et documentation en économie de la santé), ce sont sur le territoire quelque 700 infirmières et 3 000 médecins généralistes qui se seraient investis dans cette coopération de soins pour le suivi de patients chroniques. Selon le Dr Vanessa Fortané, du syndicat de jeunes généralistes Reagjir, très investie dans la coopération interprofessionnelle, ces effectifs continueraient même de croître.
Les professionnelles qualifiées et reconnues
Formées à l’éducation thérapeutique (ETP), les infirmières interviennent auprès d’un ou plusieurs médecins généralistes (à leur cabinet) qui leur adressent des patients en consultation pour partager leur suivi dans le cadre de quatre protocoles : dépistage et prise en charge du diabète, suivi des patients à risque cardio-vasculaire, dépistage de la broncho-pneumopathie chronique obstructive et dépistage des troubles cognitifs. Dans une étude sur la coopération MG infirmières publiée en avril dernier, l'Irdes évoque le fonctionnement du binôme. Souvent demandeuses, les infirmières Asalée ont de grandes motivations et « ambitions » pluridisciplinaires en intégrant ce dispositif. Elles ont des « attentes fortes » en matière d'autonomie accrue et dans le relationnel avec les patients. Elles y voient aussi l’opportunité d’expérimenter des pratiques avancées. Les généralistes, de leur côté, sont davantage en attente d'une meilleure qualité de prise en charge et d'un plus grand confort de travail.
Par le biais d’une délégation dérogatoire d’actes des médecins, les infirmières Asalée, après adressage du médecin généraliste et consentement du patient, peuvent réaliser des électrocardiogrammes pour les patients DT2 et les patients à risque cardiovasculaire, la spirométrie (pour la BPCO), l'examen des pieds (pour le DT2), une éducation thérapeutique ainsi que des conseils des patients en matière d'hygiène nutritionnelle et d'observance du traitement.
Gain de temps pour les médecins
Les motivations des médecins diffèrent selon leur implication dans ce système. Les initiateurs de projet sont forcément très enthousiastes. Certains répondent à la sollicitation afin de tester une expérience de coopération qu’ils jugent intéressante, tandis que d’autres manifestent plus de réticences, voire une certaine méfiance. Le processus de sélection alors moins maîtrisé par l’association, a parfois aussi conduit à recruter des médecins sans connaissance réelle du dispositif rapporte l'Irdes. Mais s’ils n’ont pas reçu de formation sur ce dispositif durant leur internat, les jeunes généralistes qui s’installent, s’adaptent très vite à ce mode de travail pluridisciplinaire et n’y trouvent que des bénéfices ! « Ça change la vie, assure le Dr Fortané. On entre dans un suivi coordonné, on gagne du temps sur la maladie, et dans nos cabinets. Le malade reçoit une bonne éducation thérapeutique par le biais croisé de deux professionnels de santé ; les résultats le prouvent, rares sont ceux qui rechignent à aller voir l’infirmière Asalée et nous médecins, nous sommes bénéficiaires de ce système. »
L’Irdes a évalué l'expérimentation de coopération entre médecins généralistes et infirmières Asalée. Et même si médecins et infirmières s’accordent sur une « perception modeste » des impacts d'Asalée, la plupart des médecins généralistes se perçoivent satisfaits des apports globaux du dispositif pour leur pratique (55 %). Le dispositif a entraîné une petite évolution de la posture médicale, le praticien tendant à déléguer une partie de son activité au profit d’un gain de temps qui peut servir l'accueil de patient occasionnel.
Dans ce contexte, la Direction de la Sécurité sociale a financièrement soutenu, entre 2010 et 2018, l’extension nationale d'une expérimentation créant un cadre favorable au travail en équipe. Ce financement perdure sous forme de salaire des infirmières Asalée et d’une indemnisation des médecins ! Les médecins reçoivent une indemnisation proportionnelle à leur temps de travail (réunion, suivi de ces patients), quant à l’infirmière, c’est l’équivalent de 20 % d’un temps plein par médecin généraliste qui lui est versé à travers l’association Asalée ! « Dans notre maison de santé, rapporte le Dr Fortané, nous sommes 5 médecins dont 3 jeunes. Nous sommes tous convaincus par cette coopération et donc l’infirmière Asalée a chez nous un temps plein. Elle a ainsi son cabinet dans les locaux ce qui facilite les échanges, les suivis et les orientations directes des nouveaux patients. C’est très efficace, rassurant et ça nous soulage nous faisant gagner du temps. Maintenant, personnellement je ne fais pas ça pour l’argent ! »
A. C.
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