Le Conseil d'État a donné raison mercredi à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), et rejeté la demande des associations AUBES et du collectif BACLOHELP qui demandaient l'annulation de l'abaissement par l'agence de la dose maximale de baclofène recommandée dans le traitement de l'alcoolisme. En février dernier, le Conseil d'État avait déjà refusé de suspendre la décision de l'ANSM de limiter à 80 mg/j, contre 300 mg/j auparavant les doses maximales de baclofène prescrites dans le cadre de la RTU, en attendant de rendre son jugement sur le fond qui a été communiqué aujourd'hui.
Par la décision du jour, le Conseil d’État rejette la demande, en précisant que la décision de l’ANSM n’interdit pas aux médecins de prescrire le baclofène à un dosage plus élevé. Il rappelle que l’ANSM peut modifier une RTU existante en cas de « suspicion de risque pour la santé publique ».
Pas d'erreur manifeste
Le Conseil d’État juge que le directeur général de l’ANSM n’a pas entaché son appréciation d’une erreur manifeste. Lors de l'audition devant le Conseil d'État, les plaignants avaient fourni un grand nombre de témoignages de patients expliquant qu'ils avaient été confrontés à de nombreux refus de prescription ou de délivrance de baclofène. Certaines ordonnances, dont « le Quotidien » a eu copie, portaient des mentions de refus de délivrance par plus d'une quinzaine de pharmaciens.
À ce titre, le Conseil d’État rappelle qu’il appartient au pharmacien, « en vertu de l’article R. 4 235-61 du CSP, de refuser de dispenser un médicament, le cas échéant en en informant le prescripteur, lorsque l’intérêt de la santé du patient lui paraît l’exiger, le seul fait que la spécialité ait été prescrite à un patient en dehors de l'indication ou des conditions d'utilisation prévues par une RTU n’interdit pas au pharmacien de la délivrer dans le respect de cette obligation déontologique. » Le Conseil d'État note également que l’étude de la CNAM, de l'ANSM et de l'INSERM de juin 2017 « fait soupçonner que ces effets indésirables augmentent avec la dose prescrite ».
La suite au pénal
Les plaignants envisagent maintenant de porter l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme tribunal correctionnel. Le Conseil d’État a mené une procédure restreinte, dans le cadre de laquelle « il a jugé ne pas avoir de capacité légale d'examiner dans le détail l'enquête de pharmacovigilance de l'ANSM » qui a servi de base à la décision de l'agence, explique au « Quotidien » Thomas Maës-Martin qui dirige le collectif BACLOHELP et avait porté l'essentiel du dossier. « Au pénal, un juge aura la possibilité d'examiner cette enquête, espère Thomas Maës-Martin, de même que toutes les études scientifiques que nous avions présenté au Conseil d'État : BACLAD, BACLOVILLE, OBADE-ANGH, PINOT et al., etc. »
Pour les plaignants, la « communication maladroite » de l'ANSM a effrayé de nombreux prescripteurs et médecins, privant des patients de traitements, alors même que le Conseil d’État précise que « la poursuite d’un traitement pendant la durée nécessaire à la réduction progressive de la posologie ne peut qu’être regardée comme indispensable à la stabilisation de l’état clinique des patients considérés », et justifie temporairement une prescription non conforme à la recommandation temporaire. C'est notamment sur ce motif de défaut d'information que les plaignants vont motiver leur plainte au pénal.
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