Addiction aux jeux vidéo

Limiter les répercussions psychosociales

Publié le 27/10/2014
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S’il n’existe pas, aujourd’hui, de consensus sur les critères diagnostiques s’appliquant à une utilisation excessive, voire addictive des jeux vidéo, la littérature actuelle montre qu’une personne consacrant plus de 30 heures par semaine aux jeux vidéo peut être « addict ».

L’addiction n’est pas synonyme de dépendance. En psychiatrie, la dépendance est considérée comme la forme la plus grave de l’addiction « Parmi les addictions comportementales (achats compulsifs, cyber addictions sexuelles, jeux de hasard et d’argent...), celles liées aux jeux vidéo sont très récentes. Elles ne bénéficient pas encore d’une reconnaissance par l’ensemble du corps médical. De même, en France, deux centres se sont spécialisés dans l’addiction aux jeux vidéo : l’Institut fédératif des addictions comportementales de Nantes (IFAC) et le centre Marmottant à Paris. Mais les initiatives individuelles (émanant de médecins) de prise en charge de l’addiction aux jeux vidéo se multiplient. Et de nouveaux centres devraient être créés dans les années à venir », note le Dr Bruno Rocher, psychiatre et addictologue au CHU de Nantes.

Le caractère addictogène de l’usage des jeux vidéo concerne surtout les jeunes hommes et les jeux en réseau sur Internet. Deux études - l’une menée par l’américain Douglas Gentile (Gentile et al. 2009) sur des adolescents et l’autre par l’espagnol Tejeiro Salguero en 2002 - ont montré que 8,5 % des jeunes présentent des symptômes d’addiction aux jeux vidéo.

Perte de contrôle et isolement

L’addiction aux jeux vidéo doit être considérée non seulement comme un trouble, mais aussi comme une difficulté se révélant lors de l’adolescence, moment où les enjeux de séparation et d’individuation sont particulièrement intenses. « Ces jeunes patients nous sont, le plus souvent, adressés par leurs parents. Pour diagnostiquer une éventuelle addiction aux jeux vidéo, nous prenons en compte plusieurs critères. Un patient "addict" consacre, tout d’abord, un temps important aux jeux vidéo au détriment d’autres activités nécessaires à son équilibre telles que les relations sociales, amicales et familiales. Il s’isole. L’incapacité à contrôler et à réduire le temps de jeu est également significative. Les conséquences sociales sont, enfin, décisives pour le diagnostic : répercussions sur le travail scolaire ou professionnel, sur l’équilibre alimentaire ou le sommeil, souffrance psychique... », souligne le Dr Rocher.

Dans le service d’addictologie du CHU de Nantes, environ 100 patients ont été rencontrés depuis 2007. Lorsque le diagnostic d’addiction aux jeux vidéo est confirmé, le patient est suivi en consultation par un psychiatre et, dans les cas les plus graves, en hôpital de jour. « Nous offrons au patient la possibilité de participer à des ateliers en groupe axés sur l’estime de soi, la musicothérapie, la relaxation... Nous avons également monté un groupe d’écoute pour l’entourage des joueurs. Car la prise en charge des parents est très importante. Ceux-ci doivent s’efforcer d’établir un dialogue avec leur enfant sans stigmatiser les jeux vidéo. Ils doivent s’y intéresser, apprendre à en reconnaître les aspects positifs et les risques pour mieux comprendre et accompagner leur enfant », conclut le Dr Rocher.

*source : Livre Blanc 2013, Syndicat National du Jeu Vidéo (SNJV).

Hélia Hakimi-Prévot

Source : Le Quotidien du Médecin: 9360