LE MAP4343 (3 bêta-methoxy-pregnenolone), un neurostéroïde, exerce une activité modulatrice sur la dynamique des microtubules en se liant à la MAP-2 (Microtubule Associated Protein), ce qui stimule l’assemblage des tubulines. Or des modifications de l’expression de la MAP-2 dans l’hippocampe, et du rapport des isoformes de l’alpha-tubuline, ont été impliquées dans la pathogénie des dépressions. Le profil pharmacologique du MAP4343 objective une absence d’affinité (in vitro) pour les récepteurs de neurotransmetteurs.
Pour évaluer l’action de cette molécule chez l’animal, M. Bianchi et E. E. Baulieu (Mapreg SAS, Le Kremlin Bicêtre) ont administré à des rats Sprague-Dawley adultes une injection sous-cutanée unique de MAP4343 à la dose de 4, 10 ou 15 mg/kg, qui a été comparée à l’administration de 10 mg/kg de fluoxétine, un ISRS de référence, et d’un placebo. Dans l’épreuve de la nage forcée, une réduction de l’immobilité, un témoin d’action anti-dépressive, a été constatée à 4 et 10 mg/kg, mais non à 15 mg/kg, par comparaison avec le placebo et de manière semblable à la fluoxétine. Le MAP4343 accroît par ailleurs le comportement de nage, comme cette molécule.
Une expérimentation animale convaincante.
Mais c’est dans un autre modèle expérimental de la dépression que des différences se font jour. La tâche de reconnaissance d’objet révèle la persistance de l’action du MAP4343 pendant sept jours, alors que celle de la fluoxétine sur ce point s’évanouit au fil du temps. Dans le test du labyrinthe en croix surélevé (elevated plus-maze, EPM), qui évalue les comportements anxieux des rats, les effets de la fluoxétine sont limités, alors que le MAP4343 a une activité anxiolytique rapide et durable. Cette molécule réduit également de façon rapide l’immobilité des rats isolés, ce qui n’est pas le cas avec la fluoxétine.
Enfin, l’expression des isoformes de l’alpha-tubuline a été étudiée au niveau de l’hippocampe, de l’amygdale et du cortex préfrontal. Le traitement des rats par le MAP4343 s’accompagne d’une récupération des isoformes de l’alpha-tubuline au niveau des trois formations cérébrales, y compris en traitement « subchronique ». La fluoxétine restaure les isoformes de l’alpha-tubuline dans l’hippocampe en phase aiguë du traitement, mais non en phase subchronique ; il en est de même au niveau du cortex préfrontal. L’ISRS n’a en revanche aucun effet (en phase aiguë ou subchronique de traitement) sur la dynamique des microtubules au niveau de l’amygdale cérébrale.
Un mécanisme d’action très original.
Le MAP4343 apparaît donc très prometteur et ouvre la perspective d’une approche innovante du traitement des dépressions. Non seulement son activité anti-dépressive semble être plus rapide que celle d’un ISRS de référence, mais son effet sur la récupération de la mémoire de reconnaissance est plus durable, sans compter une action anxiolytique supérieure. Ces résultats sont obtenus par une molécule au mécanisme d’action unique : une modulation de la dynamique des microtubules neuronaux. Il est intéressant de noter que le MAP4343 a un effet sur le comportement de nage, soit une action sérotonergique-dépendante ; or on a récemment suggéré qu’il pouvait exister un lien entre la dynamique des microtubules et la neurotransmission sérotoninergique.
En raison de l’absence de biomarqueur de la dépression, il est nécessaire de confirmer ces résultats dans d’autres modèles animaux.
Bianchi M, Baulieu EE. 3bêta -Methoxy-pregnenolone (MAP4343) as an innovative therapeutic approach for depressive disorders. Proc Natl Acad Sci USA. 2012;109(5):1713–1718.
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