Associé au traitement des comorbidités, le traitement pharmacologique de l’insuffisance cardiaque chronique (ICC), avec les bêtabloquants, les inhibiteurs du système rénine-angiotensine-aldostérone puis, tout récemment, la nouvelle association valsartan/sacubitril, a permis d’améliorer nettement le pronostic des patients. Mais les approches non-médicamenteuses, elles aussi, participent largement à l’amélioration de la morbimortalité, avec en particulier les techniques de défibrillation/resynchronisation. Quant à la réadaptation à l’effort, qui a fait ses preuves sur la morbi-mortalité, elle reste malheureusement proposée à la marge.
Des indications de plus en plus larges pour la resynchronisation
Depuis ses tout débuts en 1994, la thérapie de resynchronisation cardiaque (TRC) s’est imposée peu à peu pour traiter certaines ICC avec des résultats de plus en plus nets sur l'état fonctionnel et la morbimortalité.
La méthode consiste à implanter un dispositif proche d’un pace maker mais qui stimule non pas le seul ventricule droit mais les deux ventricules. En envoyant de faibles impulsions électriques, les sondes permettent de restaurer la coordination de la contraction myocardique en cas d’asynchronisme. Il en résulte une amélioration de la fonction contractile, augmentant ainsi le volume de sang éjecté. La resynchronisation cardiaque réduit également les pressions intracardiaques d’où une moindre stase pulmonaire en amont et une amélioration des symptômes. La technique a clairement démontré son efficacité sur la mortalité dans l'insuffisance cardiaque notamment dans l’étude CARE-HF.
Et, au fil du temps, les indications se sont élargies en pour passer d'une option de dernier recours dans les IC avec asynchronisme classe IV avec FEVG très altérée au traitement préventif des premiers stades avec des FEVG moins altéré. Selon les recommandations européennes de 2016, elle est préconisée dans l’IC symptomatique avec FEVG ≤35 %, en rythme sinusal avec un BBG (QRS ≥150msec) pour améliorer la symptomatologie et la morbimortalité (classe I niveau A) et lorsque le QRS est compris entre 130 et 149 (classe I niveau B). Elle peut aussi être envisagée en l’absence de BBG (donc absence d’asynchronisme) avec des niveaux de preuve plus faibles. Dans les stades III/IV, elle constitue une stratégie possible dans certaines FA.
Le DAI discuté en prévention primaire
Les défibrillateurs automatiques implantables (DAI) ont aussi fait leur chemin. Constitués d’une, deux ou trois sondes fixées dans le cœur et d’un boîtier, ils sont indiqués pour réduire un trouble du rythme ventriculaire, via un choc électrique, parfois douloureux pour le patient. Les DAI ne sont implantés que si l'état général est bon et l'espérance de vie d’au moins un an. En prévention secondaire, après un arrêt cardiaque ressuscité, le bénéfice des DAI sur la mortalité globale et la mort subite est indiscutable.
Entre 1996 et 2005, quatre grands essais randomisés (MADIT, MUSTT, MADIT II et SCD-Heft) ont aussi démontré l’intérêt du défibrillateur en prévention primaire chez les patients à risque de mort subite. Suite à ces études, la fraction d'éjection ventriculaire gauche est devenue le critère déterminant de sélection des patients pour l'implantation en prévention primaire.
Les dernières guidelines européennes les recommandent dans l’ICC de classe II à III symptomatique malgré un traitement médical optimal, d’origine ischémique ou liée à une cardiomyopathie dilatée (CMD). Ils n'ont pas d'indications dans les classes IV réfractaires au traitement sauf chez les candidats à la resynchronisation ou à la transplantation.
Toutefois, les DAI peuvent s’accompagner de chocs inappropriés (10 %), d’une altération de la qualité de vie, d’infections ou de fractures de sonde. « Il est donc indispensable d'améliorer la stratification du risque, à la fois pour éviter les chocs inappropriés et pour protéger les patients à risque de mort subite malgré une FEVG peu altérée, en repérant des facteurs de risque autres que la FEVG », insiste le Dr Alexander Breisenstein (Zurich). Autre source de réflexion, une étude récente DANISH, menée chez 1 116 patients atteints d’IC non ischémique mais liée à une CMD avec FEVG < 35 % montre qu'après 5 ans de suivi, les plus de 70 ans ne retirent pas de bénéfice du DAI sur la mortalité totale, les décès chez les plus âgés n’étant plus liés au risque de mort subite mais à l’ICC ou à des causes extracardiaques.
« Ainsi le DAI n'est pas favorable dans toutes les IC ; ce qui doit nous amener à mieux sélectionner les patients atteints d'IC non ischémiques pour l’implantation d’un DAI en prévention primaire, probablement chez les sujets les plus jeunes avec le moins de comorbidités, et peut être à envisager plus largement les DAI sous-cutanés (voir encadré) », conclut le Pr Jeff Healey (Canada).
Chez certains patients, DAI et resynchronisation peuvent être associés, avec des dispositifs qui assurent les deux fonctions.
LES DÉFIBRILLATEURS SANS SONDE SE PROFILENT
35 ans après l’arrivée des premiers DAI, ces dispositifs ont franchi une étape décisive avec le DAI sous-cutané. La sonde, partie la plus fragile est entièrement sous-cutanée. Plus petit, moins invasif, le risque d'infections graves de la sonde est diminué et son extraction plus simple. Mais il n'assure pas la fonction pacemaker ni la stimulation anti-tachycardie. Le suivi à 2 ans de près de 900 patients confirme la sécurité et l’efficacité de cet appareil (91 % de succès au premier choc).
Stimulateur miniaturisé Nouvelle étape, le DAI sans sonde, où le stimulateur miniaturisé est implanté directement à l'intérieur du ventricule, se profile. Les deux dispositifs disponibles actuellement se sont montrés performants avec toutefois un risque de perforation cardiaque et de déplacement. Ils sont intéressants chez les patients ne requérant qu’une stimulation ventriculaire.
La réadaptation, Arlésienne de l'insuffisance cardiaque
Quand on a instauré le traitement à doses optimales, implanté si nécessaire un défibrillateur et/ou resynchronisé le patient, on n’en a pas pour autant épuisé toutes les possibilités thérapeutiques. Le pronostic de l’IC, le risque d’événements CV et de réhospitalisations après la sortie de l’hôpital, peut être considérablement diminué par la réadaptation CV associant éducation thérapeutique, prise en charge des facteurs de risque et reconditionnement à l’effort personnalisé. Les guidelines européennes ont confirmé l'importance d'inclure tous les IC, quelle que soit la FEVG, dans un programme multidisciplinaire de réhabilitation comprenant la pratique d'un exercice physique régulier adapté en aérobie. Objectif, rompre le cercle dyspnée/fatigue, diminution de l’activité physique, déconditionnement musculaire, majoration de la dyspnée. Depuis plus de 15 ans, diverses études ont mis en évidence la capacité de la réadaptation à réduire de 22 % la mortalité CV, de 42 % les évènements CV et de 19 % les hospitalisations. Sans oublier les effets bénéfiques sur la symptomatologie, la tolérance à l’exercice, la qualité de vie, les troubles anxiodépressifs, les facteurs de risque CV et les comorbidités. La réadaptation permet aussi de faire le lien entre l’hospitalisation et le retour à domicile. « Ne pas la proposer est une perte de chance pour le patient », insiste le Pr Michel Komajda (CHU Pitié-Salpêtrière, Paris).
Mais on connaît déjà les difficultés à faire bénéficier les coronariens de cette prise en charge, obstacles majorés chez les insuffisants cardiaques, généralement plus âgés et plus vulnérables : une étude a montré que seules 15 % des personnes hospitalisées à l'AP-HP pour décompensation d'IC étaient incluses dans un tel programme. Et chez les patients qui ont pu en bénéficier, il reste le défi de maintenir les acquis. C’est pourtant tout à fait possible, comme en témoigne le Dr Philippe Blanc (La Réunion) : des sessions hebdomadaires de rééducation, supervisées par un coach sportif, et une IDE améliorent l’activité physique et l’état psychologique 12 mois après la sortie d’un centre de réadaptation.
Des déclinaisons régionales
L’éducation thérapeutique dans l’IC et, plus globalement, la pratique de la réadaptation cardiaque ont pourtant fait l’objet de recommandations en 2011 sous l’égide de la Société française de cardiologie, et une étude de cohorte française montre une diminution significative de la mortalité à un et deux ans de 30 % grâce à l’éducation thérapeutique. Divers programmes ont été mis en place comme PRADO-IC pour le retour à domicile, I-CARE (Insuffisance cardiaque éduCAtion théRapeutiquE), qui inclut un diagnostic éducatif, des informations sur la maladie et les signes d’alerte, les modalités du traitement, la diététique, l’activité physique et la vie quotidienne plus les médicaments. « La plupart des propositions sont déjà anciennes mais ne débouchent, en pratique, que sur des initiatives locorégionales reposant sur la motivation de quelques-uns sans programme national structuré », déplore le Pr Michel Galinier (Toulouse).
Télex… Télex… Télex… Télex
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