Éviter la survenue d’un diabète pourrait être une motivation supplémentaire pour laisser tomber la cigarette !En effet, comme l’a exposé le Dr Ivan Berlin (service de Pharmacologie, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris) lors du Forum Codia (Paris, 10-11 février 2015), le tabagisme semble bien être un facteur de risque (voire même une cause) de diabète de type 2 ainsi qu’un facteur d’aggravation. « Le tabagisme augmente le risque de survenue de syndrome métabolique et de diabète de type 2 et va de pair avec une accumulation de graisse abdominale et une résistance à l’insuline, probablement via une stimulation constante sympatho-adrénergique », explique ainsi l’ancien président de la Société Française de Tabacologie.
Selon les rares chiffres disponibles, les fumeurs actifs ont un risque augmenté de 37 % de devenir diabétique comparé aux non-fumeurs (Surgeon General Report 2014), avec une relation dose-dépendante, fonction du nombre de cigarettes quotidiennes. De plus, selon l’Insulin Resistance Atherosclerosis Study, l’incidence du diabète est plus que doublée chez les fumeurs (OR 2,66) C’est pourquoi, tous les fumeurs devraient être dépistés pour une intolérance au glucose, un syndrome métabolique ou un diabète de type 2, estime Ivan Berlin. D’autant qu’en cas de sevrage tout peut revenir à la normale, les ex-fumeurs retrouvant un risque de diabète similaire à celui des non-fumeurs.
Chez une personne déjà diabétique, le tabac est un facteur de risque d’aggravation et de mauvais contrôle du diabète. La proportion des personnes avec une HbA1c ≥ 6,5 % ou une microalbuminurie est, en effet, plus élevée parmi les diabétiques fumeurs (de type 1 ou de type 2) que parmi les diabétiques non-fumeurs.
Le tabagisme peut aussi augmenter le risque d’hypoglycémies sévères. De plus le tabac est un facteur d’aggravation des risques encourus, avec une surmortalité considérable (+ 58% de mortalité toutes causes) et un risque augmenté de 48 % de maladie coronaire et de 44 % pour les AVC. À l’arrêt du tabac, ce sur-risque dû au tabac se normalise, mais le diabétique sevré conserve bien évidemment un risque cardio- vasculaire résiduel lié à la maladie diabétique elle-même.
Entre sevrage et prise de poids
Reste que chez le diabétique, comme pour le fumeur tout venant, le sevrage tabagique est une gageure, se heurtant notamment à l’écueil de la prise de poids. Celle-ci est en moyenne de 4-5 kg pendant l’année suivant le sevrage. « Cette prise de poids ne compromet pas l’énorme bénéfice de l’arrêt du tabac et ce, malgré le fait qu’elle peut être associée à un risque accru de diabète de type 2, précise Ivan Berlin. De plus, selon des études de cohorte, ce risque s’atténue voire disparaît après plusieurs années d’abstinence. »
De façon générale, les traitements pharmacologiques actuels (substituts nicotiniques, varénicline, bupropion) réduisent la prise de poids à l’arrêt tabagique, l’effet du bupropion étant plus important (dérivé amphétaminique).Pour autant, chez le diabétique, on ne peut rien préconiser à des fins pondérales car aucune étude comparative dans cette population n’a été menée, sur les paramètres pondéraux et métaboliques. Une méta-analyse de 2014 regroupant quatre études randomisées portant sur les aides au sevrage chez les diabétiques (programme éducationnel et moyens pharmacologiques) n’a pu tirer aucune conclusion sur la démarche optimale à suivre.
Diabétique ou non, le sevrage tabagique est donc aujourd’hui identique « car il n’existe pas de recommandation spécifique d’arrêt ni de méthode validée d’arrêt dans cette population à risque surajouté », regrette Ivan Berlin. Toutefois, chez le diabétique lors du sevrage, « on doit avoir une attention toute particulière vis-à-vis du suivi de l’IMC et de la mesure du périmètre abdominal, de la pression artérielle et du HDL-cholestérol (bas chez les fumeurs) ».
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