À l’occasion de la Journée mondiale des troubles bipolaires ce 30 mars*, les chercheurs et soignants de la Fondation Fondamental ont dressé un état des lieux des avancées de la recherche et de la prise en charge de cette pathologie qui affecte plus de 600 000 personnes en France.
Stigmatisée, la maladie est encore diagnostiquée avec 10 ans de retard en moyenne. Et la recherche dans ce domaine pâtit d’un sous-investissement chronique, avec « seulement 2 % du budget de la recherche biomédicale dédié à la psychiatrie », a déploré la Pr Marion Leboyer, directrice de la Fondation Fondamental, lors d’un point presse virtuel, le 26 mars.
Une espérance de réduite de 15 à 20 ans
Les patients connaissent par ailleurs une espérance de vie réduite : de 15 ans en moyenne chez les femmes et de 20 ans chez les hommes. En cause ? Un taux de suicide élevé, mais aussi des maladies cardiovasculaires, des cancers et une forte prévalence de maladies somatiques. Les prévalences du syndrome métabolique et de la stéatose hépatique non alcoolique sont deux fois plus élevées chez les bipolaires qu’en population générale, mais ces pathologies restent « peu diagnostiquées et peu traitées », rappelle Ophélie Godin, épidémiologiste au sein de la Fondation Fondamental.
La prise en charge dans les centres experts dédiés vise ainsi à améliorer le diagnostic, à mieux comprendre les troubles et les pathologies associées et à élaborer de nouvelles stratégies thérapeutiques. Les 12 centres actuellement en activité dans la plupart des régions métropolitaines vont être complétés par l’ouverture de quatre nouveaux centres « en cours d’installation » à Brest, Limoges, Lyon et Toulouse, indique la Pr Marion Leboyer.
Cette prise en charge spécifique permet notamment de réduire les coûts associés aux troubles bipolaires. Dans une étude, lancée en 2019 sur 1 116 patients, le coût médical direct a été évalué à 7 000 euros par an, en moyenne, par patient bipolaire (contre 2 000 euros pour un diabétique). Environ 80 % de ces coûts sont liés à des hospitalisations. « Au fil d’un suivi en centre pendant deux ans, les coûts sont réduits de 50 % », souligne le Dr Charles Laïdi, psychiatre au centre expert adossé à l’hôpital Henri-Mondor (AP-HP), qui a mené cette évaluation médico-économique.
Des biomarqueurs pour faciliter le diagnostic
Les travaux menés au sein de Fondamental tentent par ailleurs d’améliorer le diagnostic par l’identification de biomarqueurs sanguins spécifiques aux troubles bipolaires. Une récente recherche, publiée dans « Brain behaviour and Immunity Health », a ainsi mis au jour trois marqueurs permettant de différencier le trouble bipolaire du trouble dépressif.
« Aujourd’hui, un médecin ne peut distinguer un patient bipolaire d’un patient unipolaire qu’après s’être longuement entretenu avec lui, ce qui nécessite, non seulement, beaucoup de temps mais également une formation très spécialisée », explique le Dr Raoul Belzeaux, psychiatre à l’hôpital universitaire de Marseille et chercheur à l’Institut de neurosciences de la Timone. Actuellement, plus de 40 % des patients bipolaires sont à l’origine diagnostiqués unipolaires et le délai moyen pour un diagnostic correct est de 7,5 ans.
L’analyse d’échantillons biologiques et de données cliniques à l’aide de méthodes d’intelligence artificielle a permis de déterminer le dosage de trois protéines dans le sang (IL-10, IL-15 et IL-27) caractéristiques d’un trouble bipolaire. Réalisable dans un laboratoire d’analyses médicales public ou privé, ce dosage facilite le diagnostic. D’autres recherches sont en cours au sein des centres experts. Un livre numérique, publié à l’occasion de la Journée mondiale, offre un aperçu des travaux menés.
* Date anniversaire de la mort du peintre Vincent Van Gogh.
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