« Échec », tel est le résultat de la politique de réduction de l'isolement et de la contention, selon la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Dominique Simonnot, qui a rendu public ce 2 juin son rapport annuel.
Si le CGLPL appelle de ses vœux depuis 2016 un encadrement de ces pratiques, la réforme qui a fini par voir le jour après moult péripéties le 22 janvier 2022 rate sa cible. D'abord, parce qu'elle reste incomprise des psychiatres, quand ils ne la rejettent pas tout simplement.
Une loi perçue négativement
« Le CGLPL avait recommandé dès l’été 2021 que le dispositif recueille l’adhésion des professionnels au cours d’une consultation institutionnelle large et puisse s’inscrire dans la réalité des pratiques. Il recommandait aussi que l’évolution des pratiques soit accompagnée, notamment par des actions de formation », lit-on.
Or, dans un contexte de crise profonde de la psychiatrie et d'épuisement des psychiatres, « la mise en place du registre d’isolement et de contention a été comprise par les soignants comme une nécessité administrative voire une pure contrainte réglementaire sans que l’intérêt réel de cette mesure pour l’analyse de leurs pratiques ne leur soit présenté et surtout sans que ce registre ne soit orienté vers une politique de réduction », déplore le CGLPL.
Une traçabilité douteuse
Et cet échec se traduit dans les faits : depuis 2018, aucun établissement de santé n'a pu présenter aux contrôleurs des données complètes, vérifiées et analysées, sur les décisions d'isolement et de contention, qui doivent pourtant être inscrites dans un registre. Sur les 89 établissements contrôlés par le CGLPL de 2018 à 2021, seuls 26 ont pu faire l’objet d’une analyse, parfois seulement de manière partielle. Et leur examen met en lumière des interprétations variées des textes, notamment de la notion de « dernier recours », qui peut expliquer l'utilisation de ces pratiques.
« Ce constat conduit à douter de la fiabilité des analyses nationales produites sur le fondement de ce recueil », indique le CGLPL, estimant que ces pratiques, « loin de régresser, se développent et se banalisent, parfois considérées comme normale, parfois comme un mal nécessaire ».
Si le CGLPL ne jette pas (trop) la pierre aux psychiatres, il considère qu'il « appartient aux chefs d’établissements, mais aussi aux autorités de tutelle d’aligner leurs pratiques sur les moins contraignantes », puisque certains, comme le pôle psychiatrique de Chinon, parviennent à s'en passer presque totalement. « Il est salutaire que les soins sans consentement, l’isolement et la contention, si durs pour les patients, ne restent pas uniquement un choix du corps médical et soient soumis à l’examen de juges impartiaux », écrit Dominique Simonnot.
L'ancienne journaliste, qui a succédé à Adeline Hazan en octobre 2020, appelle plus largement à se pencher « sérieusement sur la situation de la psychiatrie publique ».
Par ailleurs, en 2021, l’augmentation des saisines relatives aux établissements de santé (au-delà de la psychiatrie seule) constatée depuis 2016 se stabilise, autour de 14 % du total des saisines. Les principaux motifs concernent les procédures (21,97 %), l'accès aux soins (13,27 %), la préparation à la sortie (11,90 %) et l'isolement (8,70 %).
Comme l'année précédente, le rapport, qui dénonce longuement la surpopulation carcérale, regrette le manque de prise en compte par le gouvernement des recommandations des années passées, alors qu'elles devraient faire « l'objet de plans d'action décidés et contrôlés par les ministres ».
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