Par Nicolas Gorodetzki
Résumé de l’épisode 2. Un jeune étudiant en médecine dispense des soins aux habitants défavorisés d’un quartier du Caire. Après avoir examiné Salah, un vieux patient habitué, il déclare que son état est grave. Salah revient trois jours plus tard, complètement guéri, pour remercier l’étudiant et lui offrir Nout, un chat qui aurait appartenu à la déesse Bastet, 800 ans avant l’ère chrétienne…
Devant ces paroles énigmatiques, je fronçai quelque peu les sourcils, sans mot dire.
Il reprit :
– Oh ! Ne sois pas étonné, dans notre vieux pays d’Égypte, bien des choses restent mystérieuses et incroyables pour les étrangers. Mais il faut parfois admettre des choses qu’on ne peut forcément expliquer par la raison, ou par sa propre culture !
– Certes…
On a beau avoir l’esprit large, pensais-je !
– Ce chat a appartenu à des centaines de gens, connus ou inconnus. On le dit immortel, mais d’une façon que tu ne peux pas vraiment concevoir, car tu es un scientifique et cela dépasse la raison.
Il se mit à caresser le crâne du chat qui ronronna.
Puis en me tendant l’animal, il précisa encore :
– Je te le donne, car il fut pour moi une sorte de porte-bonheur, il m’a rendu le seul service qu’il pouvait me donner… La vie !
Je n’osais lui dire que la pénicilline était sans doute plus efficace que les tours de magie et les gris-gris, mais je m’abstins, sachant que je risquais de le vexer. En quelques semaines, j’avais compris le rôle des croyances religieuses et mythiques qui se perdaient dans la nuit des temps. C’était parfois le seul recours, l’opium de ces populations désespérées qui ne pouvaient plus se raccrocher à quoi que ce soit.
La religion, les mythes, la magie restaient de tout temps des valeurs refuges. Vouloir lutter contre le poids de l’Histoire et de son héritage s’avérerait vain.
Il continua d’une voix plus douce :
– Cet animal a le don d’exaucer un vœu et un seul pendant toute la période où il sera avec toi, que ce désir soit conscient ou non, du moment qu’il s’avère très fort. La force de ta volonté ou de ton envie sera son moteur déclenchant. Il sera un peu ta lampe d’Aladdin, mais tu ne pourras t’en servir qu’une fois !
Dubitatif, je secouai inconsciemment la tête.
– Oui, je sais bien que ton esprit plein de logique est en train de se dire que la maladie m’a un peu dérangé le cerveau. Mais prends-le quand même, il est très affectueux.
Comme je ne bougeais pas, un peu interloqué, le vieillard posa le félin à terre.
L’animal se dirigea nonchalamment vers moi et, tout tranquillement, sauta sur mes genoux.
Je caressai son pelage qui était d’une couleur étrangement or-fauve, strié de loin en loin par des petites bandes blanches.
Il tourna sa tête vers moi en ronronnant et je vis alors ses yeux.
On aurait dit deux pierres précieuses bleu-vert, énormes. Ils mangeaient tout son museau et la pupille verticale, d’un noir profond, fendait la pureté de ces deux petits lacs.
J’étais fasciné par la beauté de cet animal.
Je me tournai vers Salah :
– Je ne sais pas s’il me portera bonheur, mais il me plaît et j’en prendrai soin.
Salah s’inclina et avec un sourire de satisfaction sur ses lèvres et s’en revint sur ses pas.
Et c’est ainsi que Nout fit partie de nos habitudes durant tout notre séjour en Égypte. Le séjour fut une accumulation d’expériences et d’aventures d’une incroyable richesse intellectuelle et humaine pour nous trois.
Je réussis à transporter Nout dans un panier en osier lors du voyage retour. Le consulat me fut d’une grande aide pour que tout se passe dans les règles au plan administratif et sanitaire.
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