Les accidents vasculaires cérébraux hémorragiques représentent environ 20 % de la totalité des AVC. « Leur incidence reste stable en France – 12-15 cas/100 000 habitants/an – alors qu’on aurait pu espérer qu’avec le contrôle plus strict de l’hypertension, elle diminue. Cela est certainement lié au vieillissement de la population », explique le Pr Thomas Geeraerts (pôle anesthésie réanimation, CHU Purpan, Toulouse).
L’HTA chronique reste le principal facteur étiologique : elle multiplie par quatre le risque d’hémorragie cérébrale et en est responsable de plus de 50 % des cas. L’angiopathie amyloïde, surtout chez le sujet âgé, est la deuxième cause : lésions hémorragiques corticales, avec un risque de récidive important de 10 % par an. La prise d’anticoagulants (antivitamines K) est un autre facteur de risque : X 3 à 5, surtout au début du traitement (risque d’1 % par an). « Avec les nouveaux anticoagulants directs, le risque est diminué de moitié (0,5 %/an) mais l’AVC semble plus sévère et la mortalité reste élevée », déclare le Pr Thomas Geeraets.
Quant aux malformations vasculaires artérioveineuses (cavernomes, angiome veineux…) et aux anévrismes, ils sont responsables d’environ 5 % des hématomes intracrâniens. « Cette proportion atteint 30-40 % chez le sujet jeune et justifie la réalisation d’un scanner injecté systématique ou d’une IRM avec exploration vasculaire, précise le Pr Thomas Geeraerts. Enfin, chez eux, il faut également penser à une cause toxique (héroïne, cocaïne…), qui représente 6 % des AVC aujourd’hui ».
L’imagerie cérébrale doit être faite en urgence
Tout patient présentant un déficit neurologique brutal doit bénéficier d’un scanner cérébral en urgence ou d’une IRM. En fonction des arguments cliniques ou radiologiques, on pourra alors faire un examen avec injection. « Le risque principal pour les patients présentant un AVC hémorragique est l’aggravation neurologique par augmentation de volume de l’hématome intracérébral dans les heures qui suivent son apparition. C’est ainsi que l’on pratique désormais le plus souvent un scanner injecté à la recherche d’un saignement actif (spot sign) », précise le Pr Thomas Geeraerts.
De nombreuses études ont montré le bénéfice de la prise en charge des AVC dans des structures spécialisées d’urgences neurovasculaires réunissant anesthésiste-réanimateur, neurologue, neurochirurgien et neuroradiologue qui permettent d’améliorer le pronostic des patients (diminution de la morbimortalité).
Il existe différents facteurs pronostiques (taille et localisation de l’hématome, augmentation de volume dans les premières heures, comorbidités, altération de l’état de conscience…) qui permettent d’établir des scores (ICH, Func) corrélés à la mortalité dans le premier mois.
L’admission en réanimation est souvent conditionnée à la mise en route d’une ventilation mécanique. On retrouve que les deux tiers des patients intubés seront décédés à un mois et la moitié des survivants seront très dépendants à 6 mois. Le meilleur critère prédictif reste le score de Glasgow au moment de l’intubation et le pronostic très variable selon la localisation. Dans l’urgence, l’impossibilité d’une évaluation complète du patient doit faire mettre en route une réanimation d’attente.
Restaurer une hémostase efficace
Il est clairement établi que l’augmentation de volume de l’hématome est de mauvais pronostic. En cas d’AVC hémorragique survenant sous antivitamines K, ils doivent être arrêtés et antagonisés en urgence.
Le facteur VII activé qui possède des propriétés hémostatiques a fait l’objet de plusieurs études. Mais elles ont montré des effets secondaires thrombo-emboliques artériels cardiaques et cérébraux qui n’autorisent pas son utilisation.
Le contrôle de la pression artérielle est un enjeu essentiel de la prise en charge initiale comme l’ont montré les récentes études INTERACT 1 et 2. Les recommandations préconisent d’obtenir très rapidement (dans les premières heures) une Pression artérielle systolique (PAS) autour de 140 mmHg (pas au-dessus de 180 mmHg). Il est nécessaire également d’éviter l’hypoxie et l’hypercapnie afin de prévenir les agressions cérébrales secondaires, comme dans la prise en charge des traumatisés crâniens graves.
Espoir de la chirurgie mini-invasive
La place de la chirurgie dans le traitement des AVC hémorragiques reste mal codifiée. Les études STICH I et II – qui excluaient d’emblée les patients les plus graves et/ou les patients nécessitant une prise en charge chirurgicale urgente – ont comparé le devenir à 6 mois d’un groupe de patients bénéficiant d’une chirurgie précoce à un autre recevant un traitement médical ; elles n’ont pas permis de montrer un bénéfice à l’évacuation chirurgicale des hématomes intracrâniens.
D’après les recommandations, l’évacuation de l’hématome peut être envisagée en cas d’hématome› 30 ml et localisé en superficie (‹ 1 cm de la surface) ainsi qu’en cas d’hématome localisé en fosse postérieure, avec signe de compression du tronc cérébral. La chirurgie mini-invasive stéréotaxique semble intéressante.
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