« Il existe des particularités culturelles selon les pays dans la manière d'appréhender la dysfonction érectile (DE). En France, elles sont plus souvent attribuées au vieillissement ou à des conflits psychologiques qu'à une simple dysfonction organique », constate le Pr François Giuliano, urologue à l'hôpital Raymond- Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine). Pourtant les dernières recommandations de l'Association Inter-Hospitalo- Universitaire de Sexologie (AIHUS)* soulignent « l'association fréquente de la DE avec des co-morbidités rencontrées en médecine générale ».
Aussi face à ce symptôme complexe, il est nécessaire de faire la part de l'organicité et du psychosocial en recherchant « le caractère primaire ou secondaire de la DE ». D'où l'importance, avant de prescrire d'une manière réflexe un inhibiteur de la phosphodiestérase de type 5, d'explorer ce symptôme pour rechercher « des pathologies et facteurs pouvant favoriser ou aggraver une DE » comme des antécédents abdomino-pelviens, une endocrinopathie une affection neurologique (SEP, Parkinson...), des troubles du sommeil (apnée, insomnie) , etc. Et « l'existence d'une DE doit désormais faire évoquer et rechercher un diabète et une pathologie cardiovasculaire sous-jacente », insiste l’AIHUS.
Surmortalité
En cas de diabète, l'origine de la DE est souvent multifactorielle, mettant en cause la dysfonction endothéliale, une éventuelle neuropathie, sans oublier le retentissement psychologique lié à toute maladie chronique. La DE apparaît plus fréquemment et plus précocement que chez le non-diabétique (20 à 64,7 % de DE chez le diabétique selon les séries). L'évaluation de l'équilibre glycémique et le dépistage des complications du diabète sont donc essentiels.
S'agissant des liens entre DE et risque cardiovasculaire, les données sont de plus en plus convaincantes. Tout d'abord, la fréquence de la DE augmente en cas d'HTA, de cardiopathie ischémique, de pathologie vasculaire périphérique ou de dyslipidémie. Mais, surtout, la DE constitue clairement un marqueur de risque cardiovasculaire, mais aussi un marqueur de risque de mortalité, comme le montre notamment l'analyse combinée des études ONTARGET et TRANSCEND. Danc ces essais, les sujets à haut risque cardiovasculaire rapportant une DE ont ainsi un risque de décès toutes causes égal à 2,04 par rapport aux patients ne rapportant pas de DE, tandis que le risque d'événements cardiovasculaires (décès d'origine cardiovasculaire + infarctus du myocarde + AVC + hospitalisation pour insuffisance cardiaque) s'élève à 1,62.
Chez les patients associant dysfonction érectile et facteurs de risque cardiovasculaire, la prise en charge doit donc être agressive (équilibre tensionnel, glycémique, lipidique) et l'AIHUS recommande «?d'orienter vers le cardiologue tout patient porteur d'une DE et d'au moins 3 facteurs de risque cardiovasculaire ».
Pour autant, « l'évaluation du contexte dans lequel le patient vit sa sexualité est nécessaire pour une bonne prise en charge de la DE », poursuit le Pr Giuliano. « Il convient de questionner le patient sur sa vie sexuelle antérieure, et l’existence éventuelle de difficultés sexuelles, d’agression sexuelle, notamment dans l’enfance et de préciser le contexte actuel affectif et sexuel du patient et de son couple », recommande l'AIHUS. g
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